C’est incroyable ce que le monde de l’underground peut s’amuser à nous réserver comme surprises… Comme ce jour où Aaron Edge (Iamthethorn, Roareth) apprend qu’il est atteint de cette infâme maladie qu’est la sclérose en plaque, et décide alors de tout donner dans un ultime projet musical, invitant alors Mike Scheidt (YOB), Tad Doyle (Tad, Brothers of the Sonic Cloth) à se joindre à lui. Le résultat de cette réunion de figures emblématiques de la scène métal indé américaine va bien au-delà de tout ce qu’on aurait pu imaginer, avec vingt-cinq minutes de catharsis doom sous sa forme la plus saisissante et écrasante…
ARTISTE : Lumbar
ALBUM : « The First and Last Days of Unwelcome »
DATE DE SORTIE : 11 novembre 2013
LABEL : Southern Lord Records
GENRE : Doom métal
NOTE : ✩✩✩✩
MORE : Facebook – Site web
(NDLR : lorsque je me suis plongée dans l’écoute de cet album, je n’avais pas encore pris connaissance du contexte dans lequel il a été composé. C’est donc sans influence quelconque que je partage mon expérience sur celui-ci).
Difficile de décrire cette expérience qu’est l’écoute de « The First and Last Days of Unwelcome »… De façon aussi brute que possible, on pourrait dire qu’écouter LUMBAR revient à se faire piétiner par des trolls, puis balancer dans un coffre de bagnole puant, pour finir jeté dans l’océan avec un morceau de parpaing accroché au pied. Je n’ai pas la prétention de comprendre un millième ce qu’a pu ressentir Aaron Edge lorsqu’il a appris pour sa maladie (un ouragan a sûrement du se déclencher dans son esprit); pourtant, dès la toute première écoute, j’ai eu cette impression que le sol et les cieux s’ouvraient autour de moi, et que je pouvais relâcher toute ma rage intérieure sans faire une once de mal à autrui. Je ne ferais donc pas un track-by-track détaillé, tant chaque morceau raconte sa propre histoire, et parlera de façon très différente à chacun.
LUMBAR, c’est vingt-cinq minutes de doom sans fioritures, un déchainement de puissance servi par des riffs plombants, des hurlements ravagés et une ambiance sinistre tout du long. Pas l’ombre d’un solo, ni de ce que l’on peut qualifier de « groove » (malgré des lignes de basses titanesques), mais un mur de béton riffique, qui pourrait être bien plus monolithique s’il n’était pas parsemé de ces bruits de fond et samples qui contribuent grandement à l’ambiance 100% purgatoire de l’album. Chaque détail est pensé, chaque onde sonore compte. Aussi incohérent que ça puisse paraître, on peut dire que LUMBAR sont des orfèvres de la lourdeur. Doom.
Les sept morceaux de ce projet ont beau être très courts (la majorité d’entre eux n’excède pas les trois minutes), mais cela reste suffisant pour nous scotcher aussi sec. Indéniablement oppressants dans la forme, ils n’ont pourtant rien de démoralisant, au contraire. C’est comme si quelque chose là-dedans faisait écho à notre moi névrosé et révolté, comme si on arrivait à trouver le soulagement dans les incantations de Mike Scheidt et Tad Doyle. « The First and Last Days… » représentent sept jours pour sept titres exutoires, tel le journal de bord d’une lente et introspective marche vers l’Enfer. Pour ceux qui ne pensaient pas que le doom pouvait receler une quelconque forme de beauté, alors cet album vous prouvera tout le contraire. MONUMENTAL.
Pour finir cette chronique, j’ai pensé bon de partager ces quelques mots du groupe avec vous : « Comme beaucoup d’entre vous le savent, Aaron (qui a joué toute la musique du projet) est désormais incapable de jouer depuis l’enregistrement, à cause de sa sclérose en plaques. Donc, il est impossible pour Lumbar de faire des concerts. (…) Cela étant dit, ce projet reste un incroyable moment, un trésor que vous pouvez considérer comme un cadeau de notre part. Nous sommes vraiment heureux d’avoir accompli ça pour vous, mais aussi est surtout, comme un exutoire pour nous« . Amen to that.
Last modified: 7 janvier 2019