Sous les étoiles de Mojave avec BIG SCENIC NOWHERE et « Vision Beyond Horizon »

Written by Chronique

À croire que les légendes vivantes du Desert Rock se sont données le mot pour entamer la nouvelle décennie de la meilleure manière qui soit : Masters Of Reality, Brant Bjork, Mondo Generator, Fu Manchu, Lowrider, et la version « dream team », Big Scenic Nowhere, ont tous annoncé avoir repris le chemin des studios. À l’initiative et autour du noyau Bob Balch (Fu Manchu) et Gary Arce (Yawning Man), qui ont décidé de partager un peu plus que des tacos de leur chaîne de resto préférée, leurs potes et pionniers de la scène ont contribué à l’élaboration de ce « Vision Beyond Horizon ». Ce véritable premier long format fait suite à un EP en 2019 dans la série des PostWax Sessions, dont la sortie s’apparentait plus à un premier coup d’essai du collectif qu’une réelle réussite.

Dans le 7ème Art, ce genre de casting cinq étoiles est généralement un outil marketing plus propice à masquer la pauvreté d’un scénario tenant sur un timbre poste ou une réalisation peu inspirée. Autant dire que nous étions en droit de nourrir quelques doutes sur cette collection de titres. Mais ces vétérans du stoner et desert rock ont encore de quoi nous étonner et il faut bien le reconnaître, BIG SCENIC NOWHERE est une bien belle surprise.

Comme une évidence, les riffs massifs de Bob Balch s’accordent admirablement au jeu atmosphérique de Gary Arce. Si cet entrelacs constitue l’assise même de la musique de BIG SCENIC NOWHERE, chaque invité s’y illustre suffisamment pour y apporter une couleur propre à son univers, faisant de « Vision Beyond Horizon » un moirage inédit dans le Desert Rock. Le titre central « Hidden Wall », et certainement le meilleur (puis « Tragic Motion Lines » construit de manière similaire), est le parfait reflet de cette combinaison antinomique des deux musiciens hors pair. Si ce sont les rêveries de Yawning Man qui nous bercent au départ, ce sont les solos de fuzz en feu de Balch qui emballent et clôturent le titre de près de sept minutes, élégamment ponctués de chauds claviers. Un peu comme si le ciel étoilé que vous contempliez, s’embrasait subitement d’un blues rougeoyant.

Cet équilibre est quelque peu gâché par des choix esthétiques surprenants. Comme ce brûlot punk « The Paranoid » (certainement une idée d’Oliveri), égaré dans cette setlist. Certes le punk est une influence du genre et le titre est plutôt bon, mais il est isolé et inattendu dans un album à la construction rythmique progressive. On peut également reprocher des voix à peine harmonisées sur certains refrains répétitifs (« Mirror Image »), fort heureusement compensées sur d’autres titres par de superbes lignes de chant de Lisa Alley, seule voix féminine du collectif (« Then I Was Gone », « Shadow From the Altar », autre réussite de la plaque).

Mais ces quelques défauts ne doivent pas venir ternir ce vent de fraîcheur sur une scène qui peine à se renouveler. Tout en respectant les canons du genre, « Vision Beyond Horizon » apporte suffisamment de diversités et de perspectives nouvelles pour que l’on s’y intéresse. Une perception au-delà de l’horizon en somme.

Et il est donc assez cocasse que ce soit onze vétérans, onze icônes, qui, en 2020, plus de vingt-cinq ans après l’avènement d’un genre, nous épatent encore et creusent le sillon sous le soleil brûlant du désert de Mojave.

ARTISTE : Big Scenic Nowhere
ALBUM : « Vision Beyond Horizon »
SORTIE : 31 janvier 2020
LABEL : Heavy Psych Sounds
GENRE : Heavy rock / progressif
MORE : Facebook / Bandcamp / HPS Records

 

 

Last modified: 9 février 2020