On the road with MARS RED SKY : Lille, Berlin, Varsovie.

Written by Live

Pour la deuxième fois cette année, j’ai été débauchée par MARS RED SKY pour les accompagner en tant que merch girl/driver sur les dates de leur tournée estivale. Le plan ? Décoller de Bordeaux, frapper Lille d’un grand coup, pour ensuite dériver sur Berlin et enfin finir notre course au festival Days Of The Ceremony en Pologne. Ce n’est pas un report pur et dur des concerts que je vais vous proposer là, mais plus un carnet de route illustré et bourré d’anecdotes complètement inutiles. Parce qu’au fond, on a tous envie de savoir comment est la vie d’un groupe en tournée. « Keep your eyes on the road, your hands upon the wheel »…

18 juillet 2013 : On the road to Lille (France)

Après avoir passé la nuit chez Matgaz (drummer de son état) à Angoulême, c’est surmotivés qu’on décolle pour le Ch’Nord. Le soleil est avec nous, la joie de vivre aussi. Sept heures de route jusqu’à Lille, l’endurance est de mise et les débats philosophiques deviennent inévitables, comme lorsque les gars se demandent quelle est la meilleure façon de « transporter » Beth Ditto de Gossip sur scène. Une fois passé les bouchons du périph’, on arrive à La Péniche. Eh ouais, ce soir Mars Red Sky joue sur un bateau amarré sur un canal, au beau milieu d’une esplanade tout en verdure et en joggers du dimanche. On est pas bien, là, au soleil ?

Ce soir, c’est donc le deuxième show des soirées « Stone The Boat » à la Péniche. Il paraît qu’hier, le set d’Acid King a laissé de marbre pas mal de gens (j’ai d’ailleurs entendu la même chose de copains parisiens qui les ont vu quelques jours auparavant). Selon les mêmes échos lillois, le chanteur de Pet The Preacher méritait en revanche à lui seul le déplacement et l’achat d’un pass. Je ne vois pas du tout pourquoi… Tout ce qu’il faut retenir au final, c’est que ce soir, le set estampillé « Vaudou/Black Sabbath/Pinard » de Mars Red Sky va donner une leçon de son psyché à nos amis du Ch’Nord, et ce pour leur plus grand bien.

Pendant que les gars de Bright Curse balancent, les gars de la salle nous filent des jetons pour le repas du soir. « Ça vous dérange pas de manger des burgers ? ». Après qu’ils nous aient expliqué que c’était un food truck qui faisait des burgers maisons, je vois pas ce qui pourrait nous déranger. Si j’en fais tout un foin, c’est parce que c’est honnêtement le meilleur truc que j’aurai mangé du week-end. Hmmm, le « Lambert », son steak haché aux oignons maison, son bacon grillé, sa fourme d’ambert… Delicious.

Avant même l’ouverture des portes, les gens sont déjà en masse en train de prendre l’apéro sur le pont supérieur. C’est une bonne soixantaine de personnes qui se presse pour voir le set de Bright Curse. J’aime beaucoup l’EP du groupe (chroniqué ici), mais je trouve qu’il manque ce petit truc qui fait que le live décolle. À sa décharge, le groupe n’existe que depuis un an et n’a pas encore assez arpenté les salles pour être calé au poil et trouver sa « texture » en live. À revoir au Glad Stone Fest 7 en octobre (après leur première tournée anglaise aux côtés de Trippy Wicked). Mais au fait, je vous ai dit que j’ai trinqué avec le « Roi de la Frite » et Romain de Bright Curse ?

Il faut dire ce qui est, la texture est tout autre lorsque Mars Red Sky monte sur scène. Pas étonnant qu’ils brillent autant au sein de la scène stoner européenne et tournent autant, car ces gars ont vraiment une identité sonore, un son qui leur est propre. C’est écrasant et jouissif à la fois. Toujours incroyablement puissant. Le public lillois est un peu mou à mon goût, ils doivent pas avoir l’habitude de se taper des 35°C l’été, ça a dû les assommer. Jimmy tente une vanne en leur disant que nous aussi, à Bordeaux, on a un « serial pusher » qui fait tomber les gens dans la Garonne. Le Lillois ne comprend pas la blague, il est dérouté. Mais la fin de soirée nous prouvera que le Lillois est quand même vachement sympa, et ce ne sont pas les retrouvailles avec deux tiers du groupe Glowsun qui me feront dire le contraire ! Après des adieux chaleureux avec les mecs de La Péniche, direction l’hôtel pour une nuit de repos indispensable avant le méga tronçon de route jusqu’à Berlin.

19 juillet 2013 : On the road to Berlin (Allemagne)

Comme des warriors, on prend un petit déj survitaminé pour tenir les sept heures de conduite qui nous attendent. Bruce Springsteen et Steve Earle sont nos compagnons de route. Enfin passée la frontière allemande, le changement est radical : non seulement il n’y a (officieusement) aucune limitation de vitesse sur l’Autobahn, donc rouler à 140 est considéré comme LENT par les allemands, mais en plus les queues de poisson et freinages intempestifs sont règlementaires dans ce pays. Je ne plaisante pas ! Et qui se doutait qu’après notre pause saucisse à la station service, nous allions tomber sur vingt kilomètres de bouchons à 150 bornes de Berlin ? Au début, on pensait que ce serait provisoire. Sauf qu’on bout de deux heures, on commence sérieusement à s’inquiéter…

Il faut noter que l’Allemand est très relax dans ce genre de situation, là où le Français commencerait à klaxonner et à pester dans tous les sens. Il sort de sa décapotable Audi, il va tailler le bout de gras avec le voisin, bref, à la cool. De notre côté, les gars imaginent un concept brillant de blog où on ne chroniquerait que des albums médiocres et qu’on appellerait « La Merde et Les Dents » (« parce que dans le cochon, tout est bon, sauf la merde et les dents » dixit Matgaz) (attention, concept breveté). Après quoi nous passons par trois phases.

1. La connerie. On se moque des voisins. Il faut dire qu’il y a matière à commenter.
2. L’ennui. On décide d’allumer la radio. Katy Perry s’égosille. Bof, au point où on en est…
3. Le dépit absolu.

Au bout de trois heures et demie, ça décolle enfin. Il est 21h, on devrait être à la salle depuis une heure, c’est donc à 160 kms/h que je vais rouler sur les 180 bornes restants (je me sens comme Jason Statham dans « Le Transporteur ») pour enfin arriver à Das Hotel dans le quartier cool de Kreuzberg. Il y a du monde, les gens n’ont pas l’air trop perturbés par le retard et picolent des bières tranquillou à l’extérieur de la salle.

Le personnel du bar se mobilise en masse pour nous aider à décharger le matos au plus vite. Je découvre une cave minuscule avec des bougies partout (ambiance occulte à souhait), et sympathise avec les membres du staff, à 90% d’origine espagnole. Dédicace à Jordi, mon assistant de fortune au merch.

Les gars commencent le concert, et aussitôt des dizaines de personnes accourent pour se mettre immédiatement à headbanguer. L’ambiance est radicalement différente d’hier, on sent que les gens sont à fond, qu’ils connaissent le groupe et l’attendaient depuis des lustres (le dernier concert de Mars Red Sky à Berlin remonte à mai 2012 au White Trash). Il y a quelque chose de plus doomy dans le set de ce soir, et la présence de l’instrumental « Falls » dans la setlist n’y est pas pour rien. Voici un aperçu de l’atmosphère mystique qui plane…

À minuit passées, le show se termine, la salle se vide en deux secondes. Il faut dire qu’il fait au moins 35°C dans la cave. Après avoir bouffé des pizzas sur une placette pas loin de la salle, nous rejoignons l’appartement de nos adorables hôtes américains, Melissa et Elias.

20 juillet 2013 : On the road to Days Of The Ceremony festival / Varsovie (Pologne)

Avec à peine cinq heures de sommeil dans les pattes, pas de temps à perdre si on veut arriver à Varsovie dans les temps. Le ralentissement de rythme est flagrant une fois la frontière germano-polonaise passée, c’en est frustrant. Aaaah, l’Allemagne donne de bien mauvaises habitudes… Il faut savoir une chose concernant la vie en tournée : les gens pensent très souvent que ce sont les vacances, qu’on va visiter plein de villes cool et voir plein de beaux paysages. Eh bien c’est faux. Dans le cadre d’un mini-tour intensif comme celui ci, où on a une date par jour et des centaines de bornes à se mettre dans les dents, les trois seules choses que l’on découvre des pays en question sont : l’autoroute, l’aire d’autoroute, et la bouffe/bière locale. En parlant de ça, bienvenue dans les stations service polonaises…

On parvient quand même à trouver de la nourriture, enfin si on peut dire. Le plat national en Pologne ? La kotlet chabowy. Un espèce de morceau de viande pané accompagné d’une salade de chou et de frites. En fonction des assiettes, la viande est plus ou moins grisâtre… Si l’on se fie au dégradé de gris dans nos assiettes respectives, Jimmy a deux fois moins de chance d’y survivre, alors que je devrais m’en sortir avec seulement quelques crampes à l’estomac. Nous survivons tout de même à la kotlet, et un instant Nutella se produit : nous sortons de l’autoroute direction Warszawa et parvenons jusqu’à la salle uniquement grâce aux intuitions de Jimmy (je rappelle que nous n’avons plus de GPS depuis l’entrée en Pologne). Il est 17h, les gars jouent à 19h45 : on est large. Le temps d’inventer de baragouiner quelques mots en polonais à des riverains pour trouver l’adresse exacte, et nous voilà pris en main par toute l’équipe technique du Days Of The Ceremony Festival. Il faut dire ce qui est : ils sont aussi sympathiques qu’ils sont pros. Et puis l’ambiance ici est VRAIMENT cool.

Une fois le stand merch installé, je peux me délecter de quelques concerts en pointillés. Premier ÉNORME coup de coeur avec les Allemands de Samsara Blues Experiment. Une pause s’impose, ce groupe me captive. Les jams blues soul cosmiques de quinze minutes, la voix totalement Hendrixienne de Christian Peters… Mon petit coeur chavire totalement pour le quatuor. Je ne sais pas quoi dire d’autre, ce groupe est absolument fantastique, merveilleux. Jugez par vous-même.

Il paraît que le public polonais a pour habitude de scander « Mars Red Sky ! Mars Red Sky ! » à chaque fois que le groupe joue sur leurs terres. Pourtant, lorsque les gars montent sur scène, ce sont d’abord des applaudissements polis qui ponctuent le set (on se croirait à Roland Garros). Filmer le groupe depuis la barrière s’avère fastidieux, car une horde de photographes s’agite dans la fosse. Julien Pras Superstar !

Après avoir chopé un ou deux morceaux en vidéo, je retourne faire mon taf au merch et accueillir les sympathisants du groupe qui se jettent sur les vinyles. Avant le rappel, j’entends enfin au loin le cri de guerre « Mars Red Sky ! Mard Red Sky ! » et repense en souriant à ce que me disaient les gars sur la route. Il semblerait que le public timide se soit enfin mué en public rock digne de ce nom !

Je dois l’avouer, le live d’Acid King ne me convainc que moyennement. C’est long, répétitif, bref, ça ne me parle que très peu. L’heure d’aller manger en backstage, l’heure de la kotlet chabowy ! Mais celle-ci est quatre étoiles comparée à celle de l’autoroute. Pentagram est le prochain groupe à jouer, et bien que je ne supporte pas Bobby Liebling (c’est physique, j’y peux rien), je dois admettre que ces gars ont un son imparable : non, en fait ils ont LE son. Pentagram c’est le bulldozer qui arrache tout sur son passage, et qui, même si comme moi tu as Bobby en horreur, te fait headbanguer et lever le poing en l’air quoiqu’il arrive. Matt Goldsborough, Greg Turley et Sean Saley sont des machines de guerre, réglés comme de vraies horloges. Des légendes. Allez bim, dans les dents.

Pour clôturer la soirée, voici ceux que je voulais voir à tout prix (car je les avais lamentablement ratés au Desertfest) : BELZEBONG. Avec un nom pareil, pas besoin de trop vous expliquer le délire du groupe polonais. « Doom et weed » suffisent. Et en effet, doom et weed suffisent, puisque sans un mot et sans artifices, le groupe va bastonner du gros riff occulte pendant une heure et headbanguer sans jamais lever les yeux vers le public. Mais putain qu’est ce que c’est efficace. All hail the bong…

Le lendemain, après un petit déj à l’hôtel en compagnie de Pentagram et Pet The Preacher, nous prenons la route pour un Varsovie-Bordeaux en ligne directe. Vingt-quatre heures de route, qui dit mieux ? Mais ce festival valait dix fois le déplacement et la fatigue. Prochain épisode « On the road » avec le tronçon sud de la tournée d’été : direction l’Espagne et la côte portugaise les 23 (Vitoria), 24 (Leon) et 25 août (Sonic Blast Festival à Moledo). Pour finir sur une note cool, je vous laisse découvrir la playlist du moment de Matgaz :

BRUCE SPRINGSTEEN « Born to Run »
THE BAND « The Night They Drove Us to Old Dixie Down »
THIN LIZZY « Soldier of Fortune »
JAWBOX « Savory »
NIRVANA « Lounge Act »

Un mois sans faire de Tetris, ça va me manquer…

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Last modified: 29 juillet 2015