Mise en orbite avec « Reign Of The Orion » du trio prog psyché SPACESLUG.

Written by Chronique

On s’était laissé transporter en 2018 par les stakhanovistes polonais SPACESLUG avec leur odyssée doom « Eye The Tide », clôturant magistralement en coda un mouvement entamé avec leurs précédents albums « Time Travel Dilemma » et « Lemanis ». Un album unanimement salué pour sa capacité à nous passionner pour les voyages spatio-temporels ainsi que la puissance de sa noirceur abyssale. A l’instar de la parenthèse musicale « Mountains & Reminiscence », SPACESLUG revient avec cet EP « Reign Of The Orion » sans réellement prévenir, peu avant les fêtes, histoire de passer un Noël en orbite. 

Autant vous dire qu’à la rédaction, nous étions joie. La sortie reprend d’ailleurs les codes graphiques du précédent EP (toujours réalisé par Maciej Kamuda), comme pour en marquer les similitudes. Similitude dans l’exercice : le groupe se cherche, teste de nouvelles choses avant la sortie d’un album plus conséquent, plus consistant et plus cohérent. Les titres ainsi rassemblés n’ont pas forcément leur place sur les albums précédents et suivants mais correspondent malgré tout à l’identité sonore de Spaceslug. Ce souhait d’explorer de nouvelles voies est légitime, le groupe ne s’en étant d’ailleurs jamais caché après l’apothéose que pouvait représenter « Eye The Tide ».

Par contre mon excitation est bien vite retombée avec ce nouvel EP. Même si la démarche de celui-ci reste expérimentale, on a tout de même cette méchante impression d’avoir des chutes d’enregistrements non retenues pour composer un album digne de ce nom. Oh ! Ne nous méprenons pas ! Je ne suis pas contre l’exploration musicale mais à ce stade de fainéantise, je la préfère en studio plutôt que sur disque.

Dès l’ouverture « Down To The Sun », l’identité sonore du groupe nous leurre. On est charmé par ce vocabulaire cosmique propice à la lévitation sans quitter son canapé. Sans être transcendant, le titre s’en sort plutôt bien. Mais on est très peu surpris, la faute à une écriture roublarde en mode copier/coller. Passons immédiatement la plaisanterie New Age « SpaceRunner », dont l’effet vous rappellera le désagréable souvenir d’une pharmacopée achetée à la va-vite à l’apprenti herboriste du coin. Zéro effet en somme. « Half Moon Burns » nous rassure (enfin) quelque peu sur les capacités du groupe à contraster son propos, à jouer les montagnes russes avec nos émotions, à donner du relief à une construction progressive dans la noirceur. Mais à nouveau, le soufflet retombe très vite avec le titre suivant où Spaceslug, ankylosé, revisite Dire Straits sous Xanax. La conclusion « Beneath The Haze » n’arrivera plus à nous convaincre, tant le groupe confond trip psyché avec anesthésie.

La répétitivité des canevas de riffs, seul reproche d’« Eye The Tide », servait une méthodique construction de motifs circulaires propices à la transe. Ici, ils sont juste ennuyeux et manquent de vigueur. Oui, les seuls titres que l’on peut sauver de cet EP sont des leurres. En effet, où sont les contrastes ? Où sont les effets de surprises ? Où est le travail sur les voix qui on fait le charme de « Time Travel Dilemna »? Où est la puissance des sombres climax de « Eye The Tide » ? Si « Reign Of Orion » devait être un voyage, il ressemblerait plus à un trajet TER entre St Dizier et Culmont-Chalindrey qu’à une exploration cosmique. Entre temps si vous pouviez retrouver Spaceslug, je crois qu’ils se sont perdus en chemin. On a vite besoin d’eux.

ARTISTE : Spaceslug
ALBUM : « Reign Of The Orion »
DATE DE SORTIE : 6 décembre 2019
LABEL : Season Of Mist
GENRE : Prog psychédélique
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Last modified: 26 janvier 2020