Plongée dans l’univers post-doom apocalyptique de BLCKWVS.

Written by Interview

Depuis qu’un mail promo en février m’a fait découvrir ce groupe jusqu’alors inconnu à mes oreilles, impossible de me détacher du nouvel album du quatuor doom/post-hardcore BLCKWVS. Du temps est passé depuis la sortie de « 0160 », mais sa version instrumentale continue de tourner et me fait toujours autant frissonner à chaque écoute. Après nous avoir fait l’honneur d’une exclusivité vidéo, nous avons pu nous entretenir avec eux afin de revenir sur ce monumental pavé sonore, et en apprendre un peu plus sur un groupe encore trop peu connu sur nos terres.

BLCKWVS n’est pas un groupe fraîchement formé et a déjà plusieurs excellents albums dans sa discographie, mais j’avoue honteusement que je n’avais jamais entendu parler du groupe jusqu’à la sortie de « 0160 ». Comment expliquez-vous que malgré la qualité de votre musique, aucun média en dehors de l’Allemagne n’ait parlé de vous ?

Stefan (guitare) : On joue depuis 2003, donc clairement, « fraîchement formé » n’est pas le terme idéal, haha. On n’a jamais été du genre à sortir un album, faire la promo à fond et partir en tournée. On fait ça pour le fun, entre potes. Et puis du fait qu’on se soit peu à peu éloigné géographiquement les uns des autres, nos répèts et concerts se sont faits plus rares. On vient tous de la scène hardcore et DIY, et je pense que notre musique n’est pas purement doom ou autre. C’est peut-être aussi pour ça que les gens ont du mal à nous identifier. 

Lors de l’écriture de ma chronique, j’ai essayé de trouver des informations sur vos parcours respectifs, mais je n’ai pas réussi à trouver grand-chose. Si cela ne m’a pas empêché de parler de l’album, pourriez-vous revenir sur la genèse du groupe et le parcours musical de chacun ?

On joue tous dans des groupes de punk, HxC ou metal depuis 1993, que ce soit LoveSongCompany, Junestragicdrive, Steadfast, Cheerleaders of the Apocalypse, Kinetic Crash Cooperation, Scapegoat, Calahan, Borigor… Mais je pense que pas grand monde ici ne connait ces groupes !

Au départ, vous n’aviez ni chant ni basse, celle-ci étant apparue à partir de « 0130 », et vous avez poursuivi la construction de votre son tout en restant un groupe instrumental. Était-ce un choix délibéré de ne pas intégrer de chanteur jusqu’à présent, ou était-ce à défaut de trouver une voix qui correspondait à vos attentes ?

Notre bassiste Christian a rejoint le groupe avant la sortie de « 0130 », et on avait vraiment besoin de ça ! On a démarré comme groupe instrumental, et on le restera — même si nous avons eu deux invités au chant sur  “0150” et que ça nous a beaucoup plu ! Pendant la conception de “0160”, on parlait d’une double release… sauf qu’on n’imaginait pas le temps que cela allait nous prendre !  Au final, on est très satisfaits du résultat.

Avec un vocaliste différent par morceau, « 0160 » marque un tournant. Comment avez-vous choisi la voix qui seraient associée à chaque morceau ? En envoyant des pistes un peu au hasard, ou aviez-vous une vision de ce que vous attendiez pour un morceau donné ?

On connait tous les invités de l’album personnellement, ou on a au moins déjà partagé la scène une fois avec leurs groupes. Nous n’avons pas écrit les morceaux en pensant à des personnes précises, mais après avoir enregistré les onze titres, on a juste essayé de trouver ceux qui colleraient le mieux à l’atmosphère de chaque titre. 

Offrir aux auditeurs deux versions, avec chant et instrumentale, est une idée remarquable : d’une part il y a la version « brute » ou habituelle pour BLCKWVS, et une version plus accessible pour ceux qui ne sont pas portés sur la musique instrumentale. Personnellement, la version instrumentale me renverse à chaque écoute et me touche plus, mais certains morceaux chantés ont les épaules pour être des classiques des musiques lourdes, rayon doom/sludge ou quelle que soit l’étiquette. Comment voyez-vous la place de BLCKWVS dans la musique lourde aujourd’hui ?

On est et on restera un groupe instrumental, et nos concerts seront toujours instrumentaux. En ce qui concerne les étiquettes, on préfère laisser les gens se faire une idée. Selon moi, on n’est ni doom, ni sludge ni stoner, ou metal. On prend juste du bon temps, et on espère que les gens se retrouvent là-dedans. 

Après avoir fait écouter votre album autour de moi, beaucoup de gens ont retrouvé des riffs ou passages déjà entendus chez d’autres groupes plus connus. Or, en écoutant tous vos albums, on s’aperçoit que vous avez été allègrement copiés par des dizaines de groupes qui, eux, récoltent louanges et tournent partout dans le monde. Comment voyez-vous cette injustice ?

Je ne m’en étais pas rendu compte. On devrait les poursuivre en justice, haha ! Non, je ne sais pas, le monde de la musique est tellement vaste, et je pense que BLCKWVS offre une musique vraiment à part. Après, de notre côté, on ne peut pas nier que nous sommes nous-même influencés par des groupes — je pourrais te donner des centaines de noms !

Photo : Black Kraken Photography

Une thématique de fin du monde transparaît lorsqu’on assemble les lettres de chaque titre de l’album et l’artwork : « Black Hole No Way Back ». Est-ce l’idée que vous vouliez véhiculer avec « 0160 » ?

L’album tout entier est un concept. Les paroles viennent d’une nouvelle que notre batteur Tommec a créée. Histoire que l’on retrouve dans la pochette, qu’il a également créée de toutes pièces. On a beaucoup travaillé sur cet album, et en sommes très fiers ! Ce truc des messages cachés dans les titres des morceaux, on le fait depuis un moment.

Entre l’actualité mondiale, l’état environnemental de notre planète, les droits individuels qui régressent, c’est un peu ça le « non-retour » évoqué ? Quelle est votre vision du futur de l’humanité, si tant est que vous en ayez une ?

Je ne pense pas que les choses s’enveniment à tous les niveaux. Si tu compares avec les années 60 par exemple, tu verras que beaucoup de progrès ont été faits au niveau des droits de l’homme. Autant j’adore invoquer la destruction et la tristesse dans ma musique, autant je ne suis pas un mec constamment morose. Mais c’est sûr qu’il faut que l’on continue de se battre, de descendre dans la rue. Et apprécier la vie, car elle est trop courte ! 

Après avoir intégré une basse, ajouté des voix, qu’avez-vous envie d’essayer, pour enrichir votre musique ou poursuivre vos idées créatives ?

Bonne question ! Une chose est sûre : il n’y aura pas de saxophone sur nos prochains albums. 

Une telle musique provoquant des émotions aussi intenses, doit prendre une autre dimension sur scène. Avez-vous prévu de défendre « 0160 » en tournant, et aurons-nous le plaisir de vous voir en France ?

Merci mec ! On adorerait tourner en France et ailleurs, mais on a tous des gosses, un boulot et on vit à 300 bornes les uns des autres. Croisons les doigts pour que ça se fasse ! 

Nouvel album « 0160 » disponible chez This Charming Man Records

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Last modified: 14 octobre 2019