Le début d’année a été ponctué par le très remarqué « III » de WEEDPECKER. On reste encore ébloui par ce disque solaire où l’on prend plaisir à se perdre dans son étendue capiteuse (lire notre chronique). C’est un panorama kaléidoscopique que nous offrent les Polonais, démontrant un sens aiguisé de la composition, n’obstruant jamais des motifs grandioses par de (trop) grosses salves heavy, tout en offrant une myriade de détails parfaitement maîtrisés. Sur le tapis volant de votre salon, chaque écoute se trouve ainsi être un trip différent de la précédente fois. La richesse de ce nouvel opus propulse ainsi le groupe en fer de lance d’une scène heavy psyché dont la seule comparaison avec Elder serait réductrice. On a voulu en savoir plus sur le travail d’orfèvrerie derrière cette nouvelle réalisation et, à la lecture de leurs réponses, les gonzes font preuve d’une déconcertante facilité pour le voyage cosmique, tout au plus aidés par la prescription d’une pharmacopée abondante favorisant leur créativité. Des dispositions naturelles confirmant tout le talent de Weedpecker que nous vous conseillons de surveiller de près.
Vous avez mis la barre très haut avec ce dernier album. Votre jeu imprévisible nous laisse croire que les cinq morceaux sont de purs jams, mais les arrangements dévoilent un réel travail de ciselage. Comment s’est passé l’enregistrement ? Est-ce que sont des prises live et y a-t’il une part d’improvisation dans vos titres ?
Bartek (guitare & chant) : Sur cet album, on a surtout posé des schémas, et lorsque nous en avions assez de travailler sur une partie, nous partions en jam pour voir ce qui en découle. Il y a des jams sur l’album, mais pas tant que ça. En studio, nous avons enregistré les instruments séparément, ça nous a permis d’y aller progressivement et voir ce qui passait ou non. Il y a une part d’improvisation, car c’est toujours bon de jouer un morceau de différentes façons pour voir s’il fonctionne.
Beaucoup vous comparent à Elder, pourtant vos inspirations sur « III » sont plus à chercher du côté d’une reminiscence psychédélique initiée par des groupes comme Temples ou Tame Impala. Partagez vous le même appétit pour le vintage que ces groupes disons plus rock, voire carrément pop ?
J’aime beaucoup cette nouvelle scène psyché, il y a tellement de groupes qui méritent le détour. On est clairement inspirés par tout ça, mais on cherche aussi à combiner cette vibe psyché avec des riffs plus heavy. C’est n’est pas chose facile, on cherche encore notre façon d’exprimer ça, mais je pense qu’on s’en rapproche de plus en plus.
Comment avez vous réussi à retranscrire une « psychédélie » à l’américaine voire britannique des 60’s tout en restant incroyablement moderne ? « III » sonne parfaitement équilibré sur ce point.
J’en ai aucune idée. C’est juste un ensemble de choses qu’on écoute et qui nous inspire. Ce que tu écoutes forme comme un air dans ta tête, chose que tu peux transformer en morceau.
Est ce une volonté de vous démarquer au sein d’une scène rock psyché surchargée ? Et justement, quel regard vous portez sur celle-ci ?
Je crois qu’on joue juste la musique qui nous plait. Je n’ai pas forcément envie de me démarquer de quoi que ce soit. Ca n’a pas grand intérêt pour moi.
Votre progression au niveau des arrangements et des constructions mélodiques est réellement bluffante. Avez vous un parcours de musique « classique », ou bien vous êtes vous rapprochés de spécialistes pour vous conseiller et obtenir ce résultat ?
Des kilos de weed, mec. Plus sérieusement, je ne sais pas. Je ne vois pas notre son comme particulièrement bien construit ou bluffant. On apprend encore à produire un album. On fait encore pas mal d’erreurs pendant les enregistrements, et c’est une bonne chose car ça nous permet de progresser.
Est ce que la signature sur Stickman Records et le choix du Nebula Studio ont également compté dans la construction de ce son ? Vous avez peut-être eu accès à un matériel ou à des instruments que vous recherchiez plus précisément ?
En fait, pas du tout. On a composé, puis sommes allé au studio Nebula car il se trouve à Varsovie, où l’on vit. Nick DiSalvo d’Elder est venu nous voir jouer à Berlin, et a dit qu’il pourrait faire écouter notre musique à ses patrons du label Stickman Records. Ce qu’il a fait, et nous voilà !
Votre pochette m’a séduite, c’est elle qui m’a donnée envie d’appuyer sur play. Parlez nous en un peu plus.
Ouais, Piotrek ne voulait pas d’une autre peinture. Il a pensé que ce serait bien d’utiliser une image avec des effets. Maciej Kamuda nous a pondu le parfait compromis. Je n’aimais pas au début, parce que ça me rappelait la pochette de « Innerspeaker » de Tame Impala, mais au final c’est la musique qui compte, donc je n’ai pas plus insisté que ça. Au final, je l’aime beaucoup et trouve que ça correspond bien avec la vibe de l’album.
Ouvrons le débat : pour votre créativité, vous êtes plutôt Orange Bud ou Purple Haze ?
Plutôt AK-47 et White Widdow, bro.
Un travail aussi fourni, minutieux et détaillé est-il compliqué à rendre en live ou au contraire, avez vous pensé l’enregistrement de votre album pour le défendre sur scène ?
En fait c’est pas si difficile. Notre lineup a changé récemment, car Mroku et Falon ont décidé de partir, puis Kuks et Karol de Clockmaid sont entrés dans le groupe et ont insufflé énormément d’énergie et de fun. Ils chantent aussi, donc on en profite pour intégrer autant de voix que possible désormais. On n’avait pas ces quatre voix lorsqu’on a enregistré les morceaux, donc on essaie un peu de les remodeler. C’est un plaisir de bosser avec ces mecs, et depuis qu’ils font partie du groupe, je prends dix fois plus de plaisir sur scène.
Une chance de vous voir prochainement en France ?
En juin j’espère, je n’ai pas encore toutes les infos, donc gardez un oeil sur notre page Facebook. Cheers, folks <3
Merci à Nick et Stickman Records pour avoir arrangé cette interview. « III » est toujours disponible ici. Retrouvez WEEDPECKER sur Facebook et Bandcamp.
Last modified: 10 octobre 2018