Tout récemment auréolé d’une signature sur le mythique label Sub Pop, les toulousains ont réussi à donner un successeur à « Ummon » qui les a vus exploser à la face de l’univers étendu du métal, à grand renfort de supernovas psyché, garage et stoner. « Ilion » regorge de ressources pour continuer là où la mythologie d’« Ummon » s’est arrêtée. À tel point que seul le superlatif « colossal » fût le plus approprié pour décrire la déflagration sonique que nous venions de vivre. « Ilion » a résolument marqué ce début d’année voire l’année tout court. (PHOTOS : Sylvain Golvet)
C’était donc la date à ne rater sous aucun prétexte. Seconde date française d’une tournée qui en compte 27 à travers 11 pays différents, les toulousains ont choisi la Cigale pour tester leur popularité au sein de la capitale. Choix des plus logique que d’investir le célèbre « Music-Hall des Etoiles » pour un groupe capable de coudoyer avec les astres.
Mais auparavant, les Stuffed Foxes ont décidé de ne pas faire de la figuration dans ce bel écrin. Le sextet de Tours fait partie de la belle sélection de groupes à ouvrir pour Slift sur cette tournée (avec Servo, Hooveriii ou Karkara selon les dates). Et on est ravis de pouvoir enfin entendre en live ce combo réputé pour ses prestations. Malgré un set serré de 30 minutes, les tourangeaux développent leur style allant de la noise la plus tight à des ambiances plus psychédéliques et shoegaze, avec sous le bras de nouveaux morceaux. “On espère que c’est assez fort” s’inquiète le chanteur. C’est effectivement la seule chose à déplorer avec la bireveté du set. Pour le reste, l’énergie déployée promet tout de même de belles choses pour l’avenir de ces petits gars aux idées larges.
Avec la precision d’un compte à rebours de lanceur d’Ariane, Slift arrive sur scène alors que la désormais célèbre géode, icône du groupe, tournoie jusqu’à une vitesse épileptique. Les frangins Fossat, les guitares en bandoulières, prennent place sur scène en bretteurs de l’Espace. Immédiatement les moteurs fusées s’embrasent d’une énergie punk, Slift attaquant son set avec les deux titres d’ouverture d’ «Ilion». Torrent de riffs hypnotiques et lignes de basse assourdissantes se répondent de part et d’autre de la scène, forgeant un free rock cosmique transpercé par le cri écorché de Jean, s’étiolant et s’étouffant dans l’océan de leur musique.
C’est bien connu, personne ne vous entend crier dans l’espace… Mais cette verve est également au service de leur compositions épiques qu’ils laissent se déployer telles des fresques homériques. Un voyage entre le passé et le futur où la notion du temps qui passe s’écoute : des battements de Canek rappelant le rythme d’une horloge au début de « The Words That Never Been Heard » jusqu’à l’intemporalité de « Weavers Weft » et son chant quasi liturgique, comme si elle avait été chantée pendant des millénaires et s’offrant à nous ce soir. « Ummon » n’est pas en reste puisque le groupe y puise le titre éponyme, la solaire « Hyperion » illuminant l’espace, la lointaine rêverie « Altitude Lake » gorgée d’echos et bien sûr la titanesque « Lions, Tigers & Bears ». Leur mémorable clôture de leur concert est un saut dans l’hyperespace à la vitesse supraluminique que le groupe sait faire évoluer en la fusionnant avec la fulgurante seconde partie de « The Story That Has Never Been Told » pour une explosion de magma doom.
S’il fallait juger de la popularité du groupe, on notera que la prochaine édition du Petit Larousse intégrera dorénavant une expression bien toulousaine : « se faire Slifter ». Pas besoin d’expliquer aux chanceux présents à la Cigale ce soir-là la définition de cette expression.
Last modified: 4 mars 2024