Clutch est un grand cru classé. Non pas qu’à l’instar des grands vins il s’améliore forcément avec le temps, en revanche, comme dans le domaine viticole, il y a de bons et de moins bons millésimes. Que vaut le Clutch 2022 ? Et bien cette année, c’est « Sunrise on Slaughter Beach » et son superbe artwork rappelant l’univers graphique de Mathieu Bablet sur Carbone et Silicium qui représentent le Clutch nouveau.
Et je suis presque tenté de dire que l’album sort quelques mois trop tard tant il aurait aisément pu être la bande son de mon été. Je vais passer rapidement sur la production car c’est du Clutch qui sonne comme Clutch doit sonner, et qui applique également les mêmes recettes de composition. Non, l’important ici c’est de savoir si c’est inspiré et, pour moi, la réponse est un grand oui.
Les riffs sont bons et c’est le nerf de la guerre pour Clutch, on lorgne plus vers un « Earth Rocker » que vers les escapades plus bluesy voire garage que le groupe se permet parfois. Ici, ça tape dur, les riffs sont acérés, la section rythmique se permet des envolées voire des moments de génie clairement bienvenus. Je pense ici par exemple au break final de « Mountain of Bone » tout en tension.
Que dire aussi de « Mercy Brown » où Neil Fallon nous propose un chant moins éraillé et assez inhabituel, à la fois mélancolique et posé, le tout sur des riffs particulièrement mélodiques couplés à quelques claviers et des effets ici ou là pour une piste des plus marquantes. C’est du Clutch, évidemment mais ça ne référence directement aucun autre titre de leur discographie. Les passages hard rock grandiloquents, les chœurs féminins pour finir le morceau… s’il n’y avait ce foutu fade out, cela aurait été parfait. On peut aussi citer « Skeletons on Mars » qui attaque avec une entrée quasi post rock avec ses grosses reverbs et sa batterie endiablée, pour enchaîner sur un solo noisy, un passage de theremin, un énorme coup de coeur. Puisqu’on parle pépite, je dois m’attarder sur les dissonances pour le moins inattendues mais salvatrices sur « Three Golden Horns ». Un morceau finalement noisy à souhait. Enfin comme pour chaque album du groupe on a droit à une palanquée de tubes très directs, sur cet opus on pense forcément à « Red Alert », « Slaughter Beach », « We Strive For Excellence ».
Finalement en 33 minutes le groupe nous dévoile neuf titres très inspirés. Certains trouveront que c’est peu, mais si c’est ce qu’il faut pour avoir un album qui propose des choses sans tomber dans la redite facile mais qui contient suffisamment de hits pour ne pas tomber dans l’oubli ou s’éloigner un peu trop de ce qui a permis à Clutch de devenir le groupe rock’n’roll le plus important depuis plusieurs décennies, alors je suis preneur. Re-servez moi un verre de ce grand cru Clutch 2022, mon ivresse n’attend pas.
Last modified: 25 octobre 2022