Comment jouer une musique résolument vintage, Sabbathienne à souhait sans tomber dans le cliché ou la redite? Comme pour nombre de groupes surfant sur la vague du revival 70’s, c’est là LE challenge ultime auquel fait face HAZEMAZE. Si sur leurs premières productions, c’est par l’envie, une dimension garage et une fraîcheur authentique que le groupe s’en sortait avec ce premier album sorti pour les pontes du genre Heavy Psych SoundS, quels sont les arguments convoqués par nos quatre Suédois pour sortir leur épingle du jeu ?
Sur la forme, Hazemaze est particulièrement constant. Comme sur ses deux premiers opus, on a droit à huit morceaux et un poil plus de 40 minutes au compteur. L’artwork est quant à lui des plus conventionnels bien qu’il annonce une influence Pentagram / Cathedral plus marquée que sur les débuts. Pour la première fois, le titre final dépasse la barre psychologique des sept minutes mais pour le reste, on est en terrain connu.
Au niveau du fond, on délaisse les quelques aspects rock and roll garage que le groupe traînait encore ici ou là. Les tempos sont plus lents et les riffs empruntent plus directement au proto-doom avec, toujours, ce petit je ne sais quoi de hard rock et early heavy qui fait mouche. Certains arrangements lorgnent même parfois vers des notes sensiblement sludge lorsque la basse se fait plus sale et la guitare plus dissonante comme sur “Devil’s Spawn” ou l’intro de l’excellent “Ethereal Desillusion”. Impression renforcée par le chant parfois melvinesque et généralement peu mélodieux (mais c’est une bonne chose pour éviter de tomber dans le panneau des quinze mille clones d’Ozzy).
L’interlude “Sectatores et Principes”, à base de guitares acoustiques, orgues et percussions est certes classique mais efficace et a le bon goût de ne pas s’étendre afin de conserver ce rôle de pause mélodique dans l’album. Cette piste réussit surtout à mettre parfaitement en avant le titre suivant, le plus énervé et stoner “Ceremonial Aspersion”. Ces quelques touches de variété permettent à l’album de ne jamais ennuyer sans pour autant perdre son fil conducteur. Enfin, le morceau de clôture “Malevolent Inveigler” reste l’un des meilleurs de cet album — et on sait tous à quel point c’est important de bien finir un album. Le riff principal y est massif et bien pensé. Les couplets rappellent étrangement Red Fang tant sur le chant que sur les parties de guitares entremêlées, tout en sonnant foncièrement comme du Hazemaze. Une des vraies réussites de l’album dans un registre moins doom et plus heavy sludge rock.
L’équilibre entre une production soignée, puissante, ni trop moderne, ni trop vintage d’une part, et une écriture variée mais cohérente de l’autre viennent parfaitement servir les propos du groupe. Tout ici transpire la maîtrise et l’honnêteté. Un vrai bon album de genre, sans artifices aucun mais avec un charme indéniable.
Finalement quelles armes Hazemaze a-t-il utilisé pour rester pertinent et accoucher d’un si bon album dans ce style si particulier? Comme dit plus haut, la maîtrise et l’honnêteté. Ca peut sembler évident mais c’est une vraie leçon que nombre de groupes devraient apprendre. Ne sortir que ses meilleurs titres quitte à proposer des albums de 40 minutes, apporter un peu de variation sans perdre son identité, avoir une production adaptée, cultiver ses quelques éléments distinctifs, bref : être conscient de ses forces et faiblesses pour proposer la meilleure musique possible.
Last modified: 10 mars 2022