THE MIDNIGHT GHOST TRAIN : « On se donne 24/24 pour le groupe »

Written by Interview

On n’a pas tous les jours la chance de voir sur scène un groupe qui fait tellement de boucan et déchaîne tellement d’énergie, qu’on croirait assister à un putain d’ouragan sur un espace réduit de quelques mètres carrés seulement. Le trio du Kansas THE MIDNIGHT GHOST TRAIN a su extraire toute la chaleur du blues pour la combiner aux sonorités haute tension du rock’n’roll, pour ensuite laisser mariner le tout dans un océan de gras et de saturation. Cette tempête « heavy delta blues » ravageuse (que certains ont pu croiser au détour de plusieurs festivals orientés stoner et doom, ou même en salle cette année) ne passe pourtant que trop rarement dans nos contrées. Et vu le crochet du droit mémorable que mes congénères métalleux et moi-même avons pris à chacune des performances de TMGT, il semblait stupide de ne pas aller directement à la rencontre de son fondateur, Steve Moss. Lorsqu’il n’est pas armé de sa Gibson, de sa voix rocailleuse et de litres de sueur, le frontman de ce trio hors norme nous prouve que si la musique de THE MIDNIGHT GHOST TRAIN est aussi grisante, c’est parce qu’elle sort tout droit de l’énorme coeur de ce monsieur, sans aucun filtre. Ces gars-là tournent pour vivre, mais ils vivent pour leur musique, c’est un peu leur troisième poumon. Leçon d’humilité avec l’homme qui n’est autre que la force motrice de ce train sans pareil… (PHOTO : The Heavy Chronicles)

Avant de commencer la lecture, un autre type de lecture s’impose. 

Pourrait-on commencer par un brève description du son The Midnight Ghost Train ?

On est un groupe de heavy blues rock. On joue très très fort. Je ne suis pas particulièrement fan du terme « stoner rock », d’ailleurs aucun d’entre nous ne fume d’herbe. On est très bluesy, mais parfois quand tu dis « bluesy », surtout ici en Europe, les gens pensent « chiant ». Pour moi, le blues c’est la base de toute notre musique. Je ne connais pas le métal, je n’ai jamais écouté un album de Sleep ou Pentagram, ça ne m’a jamais vraiment attiré. Si ça ne tenait qu’à moi, je jouerais du blues old school acoustique, mais il y a ce truc avec le fait de jouer très vite et très fort… Je ne pouvais pas le contenir.

Tu as mentionné le terme « stoner rock ». Il semblerait qu’à l’heure actuelle, on tende à catégoriser n’importe quel groupe qui joue du heavy rock de « stoner », ce qui me semble assez biaisé, dans la mesure où cette musique s’enracine avant tout dans le psychédélisme et les atmosphères enfumées. 

Oui, et ça peut laisser penser qu’on est un groupe de stoner rock, comme si on passait nos journées assis à fumer des joints. Alors qu’on bosse comme des malades !

Même si tu m’as dit ne pas être intéressé par la scène stoner et le métal en général, The Midnight Ghost Train a tout de même joué dans pas mal de festivals du genre, comme le Desertfest ou le Up In Smoke Fest. Y’a-t-il certains groupes qui t’ont mis une claque lors de ces évènements ?  

Le meilleur groupe avec lequel on ait jamais joué, ce sont les Black Diamond Heavies. Ils m’ont mis une claque énorme. On a joué avec tellement de groupes, on fait genre 300 concerts par an, et ces mecs sont les meilleurs que j’ai jamais vu en live. Dans la scène heavy/stoner, je dirais Jucifer. On a tourné pendant quatre mois avec eux, et ils donnent un putain de show quoiqu’il arrive. C’est pas ma came, mais ils nous inspirent énormément en terme de live et d’éthique de travail. Ils nous ont apprit beaucoup de choses, et je les aime énormément.

Jucifer sont un peu comme vous en définitive, à être constamment en tournée. À l’exception près qu’eux sont nomades au sens littéral du terme.  

Quand on les a rencontrés, on était encore inconnus au bataillon. On a fait une date avec eux, ils ont aimé ce qu’ils ont vu, alors ils nous ont proposé de faire leur première partie sur la tournée. On avait tourné un peu auparavant, donc on pensait qu’on connaissait notre sujet, alors qu’en fait pas du tout. On a appris énormément d’eux.

« Si ça ne tenait qu’à moi, je jouerais du blues old school acoustique, mais il y a ce truc avec le fait de jouer très vite et très fort… Je ne pouvais pas le contenir. »

À quel moment avez-vous choisi de tourner autant ? 

On est juste nuls pour faire autre chose. J’étais prof avant tout ça… On devait le faire, et si on voulait en vivre, on devait y aller à fond. Avec un peu de chance, un jour on gagnera autant d’argent en faisant moins de dates. C’est dur. On se concentre uniquement sur le fait de faire avancer le groupe, on se donne 24h/24 pour le groupe. Et au final, il n’y a qu’une seule heure où on fait vraiment ce qu’on aime. D’une manière ou d’une autre, chacune de nos conversations tourne autour de la musique, et chaque centime qu’on gagne est réinjecté dans le groupe. Chaque petite chose dans nos vies tourne autour de tout ça.

C’est devenu vital.

Je suis né pour faire ça, et rien d’autre. Pour ce moment où je suis sur scène, et que j’ai la possibilité d’être qui je suis vraiment. Quand je ne suis pas en mesure de le faire, je ne me sens pas bien. C’est comme si je devais me retenir d’être moi-même le reste du temps, tu vois ?

C’est un peu comme tous ces gens qui vont à des concerts de rock et de métal, et qui se lâchent complètement le temps du show. Comme si le reste du temps, la vie semblait terne et ennuyeuse…

Ouais, c’est comme quand je te vois à nos concerts. Quand je te regarde maintenant, je vois une jolie fille propre sur elle, alors qu’à nos concerts, t’es là « yeeaaaaah!!! », tu pètes complètement un plomb (rires). C’est la même chose pour nous tous, c’est un moyen de se lâcher.

Est-ce qu’il vous est déjà arrivé d’être à court d’énergie ? 

Putain non, pas moyen ! (rires) On ne fait que commencer, et on a encore du chemin à parcourir. À chaque pas en avant, on fait aussi un pas en arrière. Sérieux. Ce groupe me tient tellement à coeur, que quand quelque chose ne se passe pas comme prévu, ça me touche en plein coeur. Ça peut devenir très stressant, mais le jeu en vaut largement la chandelle.

Quand vous n’êtes pas en tournée, ce qui n’arrive pas souvent, comment occupes-tu tes journées ? 

On vient juste de terminer de composer le nouvel album (à l’heure où je poste cette interview, l’album est entièrement enregistré). Mais en dehors de la musique… Comme je te disais, ça occupe tout mon temps. Mais j’ai deux chiens, ma femme. Quand je suis à la maison, j’essaie de lui donner un maximum de ma personne pour rattraper tout le temps passé en tournée. Je fais tout pour qu’elle se sente spéciale, en lui montrant à quel point je l’aime et comme son soutien est important à mes yeux. Et puis mes chiens, pffff, ce sont les meilleurs ! Je leur donne tout… Peut-être plus qu’à ma femme, d’ailleurs, mais ça va, ça ne la dérange pas ! (rires)

Le soutien des proches n’a pas de prix quand on tourne autant que votre groupe…

Ma mère, ma soeur et ma femme me soutiennent énormément. Mon père, qui est décédé, me soutenait plus que quiconque. Je dois tout à mes parents qui m’ont toujours poussé et soutenu, alors que je leur disais : « pourquoi être si fiers de moi, alors que je veux partir sur la route, et faire du rock’n’roll mon métier ? ». Ça me semblait fou. Ils m’ont toujours dit : « si tu veux le faire, alors fais le à fond. N’abandonne jamais, et va aussi loin que possible ».

« Le nouvel album sera bien plus puissant que « Buffalo. »

Un peu plus tôt, tu parlais du nouvel album. Tu peux m’en dire plus à ce sujet ?

Il va tout tuer ! Il sera bien plus puissant que « Buffalo ». On va un peu plus bosser sur la production, cette fois-ci. Pour « Buffalo », on voulait un son crade, et on l’a eu. Pour celui-ci, on veut vraiment prendre notre temps et essayer d’obtenir le son idéal, pour qu’il ne soit pas aussi crade et qu’il soit aussi bien plus agréable à l’oreille.

Et qu’en est-il des morceaux ?

Il n’y a aucun concept précis, c’est un album 100% rock’n’roll. Il y aura plus de chant, par contre. Et puis, maintenant qu’on a un bassiste (Mike Boyne), les parties de basse sonnent beaucoup mieux. Le batteur et moi-même avons composé les parties de basse sur « Buffalo », alors qu’on n’y connaît que dalle… Donc ouais, ce sera un bien meilleur album à tous niveaux, et il va dépasser de loin tout ce qu’on a pu faire auparavant.

On va tous exploser, alors ! 

C’est l’idée, ouais. (rires)

Pour conclure cette interview, quels sont les albums que tu aimes écouter à l’heure actuelle et que tu recommanderais aux lecteurs ? 

Comme je disais, j’écoute énormément de blues. Tout ce que fait Tom Waits, je l’écoute religieusement. Ray Charles compte aussi beaucoup pour nous trois, et on écoute sûrement plus de Ray Charles que n’importe quel autre artiste. Beaucoup de Queen, aussi. Le dernier album de Fiona Apple, « The Idler Wheel », m’a vraiment beaucoup plu. Je pense que même les gens qui ne sont pas spécialement fans de Fiona Apple pourront l’apprécier, car il est très créatif et alternatif, comme une version féminine de Tom Waits. 

Le nouvel album « Cold Was The Ground » sortira début 2015 chez Napalm Records.
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Last modified: 28 octobre 2014