Big Scenic Nowhere « Dying On The Mountain » EP

Written by Chronique

Voilà un mois que j’ai le premier EP de BIG SCENIC NOWHERE dans ma playlist « trucs à écouter / à chroniquer ». Voilà un mois que je me passe les titres, un peu dans le salon, un peu entre potes, un peu en train de faire la popote, un peu en bagnole, par-ci par-là… mais au bout du compte, sans réellement réussir à me forger un avis. Mais je sens bien qu’il est maintenant inévitable que je pose quelques mots sur le papier. Des signaux me sont d’ailleurs envoyés dans ce sens depuis l’extérieur : ma rédac’ chef qui propulse l’EP « Record Of The Week », des conversations entre érudits psyché sur la toile, ou tout simplement l’annonce récente d’un album en préparation pour début 2020…

Oui, car pour l’heure on ne vous parle que d’un EP deux titres édité dans la série  des PostWax sessions, ces enregistrements inédits de groupes livrés par le label Blues Funeral Recordings, dans le cadre d’un abonnement annuel pour des gens qui visiblement mangent l’argent en salade. Ou pour des fans hardcore de groupes qui se prêtent à l’exercice. Ou les deux. Toutefois, pour ce disque en particulier, le label a misé sur la hype autour de ce « nouveau » groupe puisque nous sommes bien en face du premier enregistrement sérieux d’une bande de potes de 30 ans, désireux de partager un peu plus que des tacos au fastfood du coin. Big Scenic Nowhere,  c’est donc un collectif mené par Bob Balch (Fu Manchu) et Gary Arce (Yawning Man) entourés de plusieurs sommités du désert, parmi lesquels Nick Oliveri, Per Wiberg, Thomas Jäger, Mario Lalli… Bref, le « Ocean’s Eleven » du Desert Rock. L’excitation autour du casting retombe dès lors que l’on se rend compte que seuls deux titres composent l’EP : une jam de plus de vingt minutes et un titre s’apparentant à un single. Pas très cohérent pour l’auditeur, qui fait le grand écart entre les deux faces du vinyle. On comprendra donc que c’est un premier coup d’essai, « la phase naissante d’une collaboration à plus long terme », dixit le groupe.

Alors quoi ? J’en reviens à ma réflexion initiale : qu’est-ce que je vais bien pouvoir faire de ce disque ? Qui a le temps aujourd’hui de se plonger pleinement dans une jam de vingt minutes sans être dérangé par un appel, un sms, l’eau des pâtes qui bout, les gosses qui pleurent ou la dernière notification sur le prochain disque qu’il faut absolument écouter ? Il est difficile d’apprécier, disséquer, décomposer des œuvres  qui méritent plusieurs écoutes dans le contexte qu’est le nôtre en 2019. L’immédiateté au détriment du plaisir, le contenu devenant obsolète dès lors que celui-ci est balancé en pâture sur les réseaux sociaux. C’est tout notre rapport à la consommation de la musique qui est mis en cause.

J’ai donc failli me faire avoir. En survolant cette jam, impossible de la pénétrer, d’en apprécier les mouvements et de vous laisser happer par le flow électrique de deux bretteurs d’exception. Comme avec Yawning Man, Gary Arce dresse des paysages immenses et majestueux, que Bob Balch exalte d’une énergie indomptable et vous submerge d’un déluge de riffs assourdissants. Comme si, pendant vingt minutes, la « Grande Vague de Kanagawa » d’Hokusai s’était déplacée au milieu du désert de Mojave.

En 2019, il est courageux de produire des oeuvres de ce type. Des œuvres fleuves, denses et magistrales comme Tool ou Cult Of Luna (dont Razort en a extrait toute la poésie ici) ce mois-ci. C’est donc ma première chronique pour ne rien dire. Ou peut être simplement l’essentiel : débranchez tout, coupez l’eau des pâtes, posez-vous et ECOUTEZ. Encore et encore.

ARTISTE : Big Scenic Nowhere
ALBUM : « Dying On The Mountain »
LABEL : Blues Funeral Recordings
DATE DE SORTIE : 27 septembre 2019
GENRE : Stoner rock / doom / prog
More : Facebook / Bandcamp / Blues Funeral Recordings

 

Last modified: 2 novembre 2019