(ILLUSTRATIONS : Razort) Mine de rien, gravir plusieurs fois cette colline pour aller manger du riff caillouteux nous a beaucoup épuisé la veille (mais ô combien comblé de joie !), nous arrivons donc tranquillement en ce deuxième jour plus chaud pour TALEA JACTA, un duo de rock expérimental doux et introspectif. Ne connaissant pas le groupe, je me dis qu’ils auraient mieux mérité de passer en pleine nuit, car c’est très chatoyant pour les tympans. Le groupe suivant se nomme GREEGO, un duo basse/ batterie avec beaucoup d’amplis sur scène et qui tabasse pas mal, et me rappelle vaguement Unearthly Trance en plus redondant et moins accessible. Ça s’écoute de loin, posé sur une serviette au bord de la piscine. La basse est aussi lourde que le soleil. Et ce dernier finit d’ailleurs par avoir raison de nous : nous retournons au camp faire le plein d’ombre et de repos car la soirée s’annonce physique.
Nous sommes réveillés en panique, 10 minutes avant le début de NAXATRAS. Mais les Grecs ont beau commencer leur superbe set, nous n’en loupons pas une miette grâce à l’acoustique exceptionnelle de la ville. Une fois devant la scène, le son est toujours aussi beau. Les membres sont en short et lunette de soleil, enchaînant les tueries avec le sourire. Leur dernier opus « III » (qui figure parmi les plus belles sorties de l’année selon moi) est mis à l’honneur avec un superbe backdrop. Tout est exécuté à la perfection, avec une propreté remarquable. Nous finissons la sieste sous les arbres et le soleil couchant, un cidre frais à la main. Jamais les vacances n’ont été aussi suaves et mélodieuses. De l’amour en riff, vous dis-je.
Le groupe suivant n’officie pas dans le même registre, et nous fait nous dresser instantanément sur nos pattes. En quelques riffs THE ATOMIC BITCHWAX nous réveillent efficacement. C’est violent, rapide, rock’n’roll (et même thrash par moments). Nous sommes fin prêts pour la suite de la soirée, qui promet d’être survoltée. Nous nous rapprochons pour l’une des plus grosses attentes du festival, d’autres barbus venus eux-aussi de Grèce…
Pour ceux qui n’ont jamais vu 1000MODS sur scène, je dirais que c’est comparable à un gros moteur vrombissant. Je ne sais pas comment ils règlent leurs amplis Orange, mais dès premières notes de « Above 179 », la scène tremble et les basses se répandent dans le square et le reste de Moledo. Elles continuent leur bout de chemin durant un show à mon sens mille fois meilleur que celui du Hellfest, car moins blindé de monde, plus rempli de fans, et une setlist qui comporte beaucoup de titres de « Super Van Vacation » – que tout le monde chante et connaît sur le bout des doigts. Moments forts sur « Vidage » et « Road to Burn », que je peux enfin hurler en chœur. Quelques slams commencent çà et là, mais ne sont pas dérangeants car adaptés à l’ambiance kyussienne sulfureuse, le public restant vigilant et bienveillant. Ambiance toujours 200% cool, son massif, public comblé : c’est une sacrée réussite et un des meilleurs shows du week-end !
Puis viennent les trois barbus et (partiellement) chevelus de KADAVAR qu’on ne présente plus. Comme d’habitude, ça tue, ça tape fort, ça séduit et le concert est encore une fois meilleur qu’au Hellfest, où ils avaient donné une prestation incroyable, sinon une des meilleures du festival… Malgré quelques problèmes avec la guitare et un chant en retrait au début, c’est un show d’une énergie nucléaire qui est déployé avec un superbe light show, notamment sur le passage expérimental qui précède « Purple Sage ». Reverb et larsen à outrance, lumières violettes, silhouettes cachées dans la fumée… on se croirait de retour dans les années 70, mais les titres du dernier album sont aussi là pour nous écraser la tête avec leur son plus moderne et gras, nous rappelant que Kadavar est assurément un des meilleurs groupes de notre époque.
Alors que nous venons de prendre deux mandales dans la tête, une dernière tuerie arrive à grands pas. EARTHLESS est synonyme d’endurance et de technicité. Je n’ai jamais vu un concert déployé à une telle vitesse, avec autant de facilité et de notes à la seconde. En fait, c’est un concert de solos et de riffs sous caféine. Ça groove méchamment, alors je me glisse au premier rang pour en prendre plein la tête, mais les gens sont beaucoup trop saouls, ça se bouscule dans tous les sens, alors je retourne bouffer du riff de loin, hypnotisé par les lumières de la scène. Pas mal de titres du dernier bijou « Black Heaven » et bien sûr des jams des anciens albums, ainsi qu’une cover de taille de Led Zeppelin : « Communication Breakdown », que j’écoute en descendant une dernière fois de la montagne, la fatigue ayant eu raison de moi. J’entends ainsi le son séduisant des BLACK WIZARDS depuis le camp et m’endort un sourire aux lèvres, dans cette forêt hostile en bordure d’une petite ville portugaise pleine de surprises et de joie de vivre.
Cadre hors du commun, concerts incroyables, public chaleureux, détendus et respectueux, prix plus qu’abordables, foodtrucks sympas et variés, ambiance vacances dans le nouveau Woodstock européen du Stoner : c’est le cœur débordant de joie que je peux affirmer que Sonic Blast Moledo est un des meilleurs endroits sur Terre, et ce malgré une organisation totalement bancale, voire improvisée. Ça fait un bien fou aux oreilles, à l’âme, et aux yeux. A l’année prochaine Portugal, c’était de la balle !
Last modified: 19 septembre 2018