Pendant que toute la famille élargie du metal n’en revient toujours pas du retour de $layer, annoncé entre quelques scuds bien placés de ses membres fondateurs, certains groupes essayent sans cesse de bouger les lignes pour nous donner une idée de ce à quoi ressemblera le metal du futur. Point de soap opéra ou de déclarations tonitruantes. Pas de grande messe metal seulement accessible à des happy fews aux comptes en banque garnis. Pas de corrections en studio ou d’IA pour l’artwork. Pas de filtres, pas de poseurs ou de hashtags bien sentis. NON. Seulement de la musique inspirée. Une philosophie DIY éprouvée. Une utilisation de tous les réseaux disponibles pour être au plus près des fans. Inventer une nouvelle conception de la relation entre l’artiste et son public, sans aucune forme d’intermédiaire. De la musique partout, tout le temps, diffusée live. Pas de dissimulation, pas de simulation, tout montrer, même les répètes. Cette démarche responsable et cohérente, Howling Giant se l’applique au quotidien. Mais Howling Giant n’est pas seulement ce groupe de musique 3.0. En fins compositeurs, ces musiciens hors pair se démarquent par une hybridation de styles réussie grâce à leur capacité de composition sans se perdre dans des labyrinthes prog. En véritable orfèvre Heavy Psyché, le groupe maîtrise parfaitement son identité, depuis l’imagerie jusqu’à la production, puissante et limpide. Notre récente découverte du groupe en live, authentique raout Heavy, nous a définitivement convaincu de papoter avec eux et d’en savoir un peu plus sur les auteurs de « Glass Future », leur dernier LP en date et pépite de l’an passé.
Howling Giant existe depuis 10 ans. Vous avez commencé par une série d’EPs à l’époque. Comment est née l’idée du groupe?
Tom Polzine (guitare & chant) : À l’origine, nous avons commencé à jammer à l’université Zach et moi. A l’époque nous nous appelions Skulldozer. C’était génial. Nous avons déménagé à Nashville et décidé de renommer le groupe, et je dirais que c’était le début de de l’aventure de ce qu’est devenu Howling Giant. Peu de temps après, nous avons rencontré « Seabass » (Sebastian Baltes, basse). C’était pendant la création de « The Space Between Worlds ». Donc oui, au début, c’était juste du jam et de la musique sur nos campagnes de Donjons et Dragons. C’était très nerdy, avec beaucoup de riffs. On peut dire que peu de choses ont changé depuis (rires).
Qu’est-ce que vous êtes au juste ? lLe véritable club de jeu qui a inspiré le Hellfire Club d’Eddie Munson de Stranger?
Tom Polzine: C’est à peu près ça, oui ! (rires)
Vous êtes probablement le groupe le plus connecté de la communauté. Vous avez votre propre Discord et vous êtes sur Twitch. Je me considère déjà un peu comme un gars de la vieille école – je veux dire par là que je suis de la génération Facebook et c’est à peu près tout – mais vous êtes plus qu’actifs sur les réseaux sociaux. Dites-nous en plus à ce sujet.
Zach Wheeler (batterie) : Aucun d’entre nous ne se considère comme un spécialiste des réseaux sociaux. C’est venu par nécessité, comme beaucoup de choses avec le groupe. À travers ça, tu trouves ta voix, comment parler aux gens… Faire des posts, ça a été intimidant pendant longtemps. Maintenant, c’est notre façon d’être. Nous parlons simplement aux gens. Nous avons des conversations avec les fans, surtout sur Discord. C’est encore plus amusant parce qu’il y a toutes ces sous-catégories dans un Discord. Nous avons même un canal cuisine. Tout le monde discute de ce qu’il prépare à bouffer, des jeux auxquels il joue… Je pense que c’est une bonne façon de passer du temps avec ses fans.
“Il n’y a pas besoin d’avoir une présence parfaite sur les réseaux sociaux. (…) On a commencé à les utiliser avec peu d’attentes, on s’amuse avec. C’est le moyen le plus direct de communiquer avec les fans.”
Il n’est pas nécessaire d’avoir une présence parfaite sur les médias sociaux. Il y a cette fausse idée chez les groupes qui pensent qu’il y a une stratégie complexe à mettre en place pour gérer Facebook et Instagram ou utiliser Twitch et Discord. Nous avons commencé à les utiliser avec peu d’attentes et trouvons maintenant un moyen de nous amuser avec, même si ça peut ressembler à du travail. Et c’est le moyen le plus direct de communiquer avec les fans les plus assidus.
C’est très intéressant. Certains groupes considèrent les réseaux sociaux comme une nécessité pour une plus grande visibilité, pour être plus tendance ou simplement pour exister. Ce n’est pas votre cas.
Zach Wheeler : Compte tenu de l’algorithme actuel, lorsque nous publions quelque chose, nous faisons simplement savoir aux gens ce que nous faisons. Nous n’essayons pas d’être plus malin que l’algorithme et d’avoir la combinaison parfaite de hashtags pour obtenir le plus grand nombre de vues pour quoi que ce soit. Nous mettons simplement en ligne ce que nous pensons être cool.
Sebastian Baltes (basse) : Ce qu’il faut savoir, c’est qu’avant la COVID, nous étions souvent sur la route. Et puis la COVID est arrivée et personne ne pouvait plus nous voir. Nous avons donc lancé notre chaîne Twitch et c’était notre façon d’essayer de connecter avec les fans et créer une communauté tout en le faisant depuis la sécurité de nos maisons.
Tom Polzine : Il n’y a pas besoin d’avoir une présence parfaite sur les médias sociaux. Il y a cette fausse idée chez les groupes qui pensent qu’il y a une stratégie complexe à mettre en place pour gérer Facebook et Instagram ou utiliser Twitch et Discord. Nous avons commencé à les utiliser avec peu d’attentes et trouvons maintenant un moyen de nous amuser avec, même si ça peut ressembler à du travail. Et c’est le moyen le plus direct de communiquer avec les fans les plus assidus.
Certains ne le savent peut-être pas, mais vous diffusez aussi beaucoup de jams. Vous avez des sessions toutes les semaines, n’est-ce pas ?
Zach Wheeler : Pendant la pandémie, nous le faisions beaucoup plus souvent, plusieurs fois par semaine. Aujourd’hui, quand nous ne sommes pas sur la route, nous essayons de faire un stream complet par semaine. Nous l’utilisons en quelque sorte pour que tout le monde puisse jeter un coup d’œil et voir ce sur quoi nous travaillons pour notre set list ou voir ce qui se passe en coulisses.
Tom Polzine : C’est ce à quoi ressemble une répétition d’Howling Giant. Il s’agit de trouver les erreurs, de les mettre en évidence et de travailler dessus. On est beaucoup plus exposé et vulnérables aussi, mais c’est ce à quoi ressemble vraiment la vie d’un groupe.
Zach Wheeler: Quand nous répétons, il peut arriver que nous nous disions : « Vous savez quoi, sur le stream de ce soir, il faut qu’on joue cette chanson. On la foire souvent et on a doit remédier à cela ». Et nous jouons la même chanson quatre ou cinq fois sur le stream. Parfois, il s’agit simplement d’essayer de petites choses différentes pour voir comment ça marche et tu obtiens des retours très concrets de la part des gens dans ces moments-là, ce qui est très utile.
Auriez-vous fait tout cela, seriez-vous dans le même état d’esprit aujourd’hui si la pandémie n’avait pas eu lieu ?
Tom Polzine : Fin 2019, j’ai contacté des amis et des groupes comme Toke et Forming the Void, avec lesquels nous étions très proches, et j’ai lancé l’idée de faire un show virtuel. « Mettons en place une demi-heure de musique et filmons-la dans notre salle de répétition. » Ils ont trouvé que c’était cool, mais ils n’avaient pas le temps de mettre en place quelque chose comme ça. Quelques mois plus tard, la COVID est devenu une réalité. Et c’était bizarre de voir que nous étions déjà sur le point de nosu embarquer là-dedans, c’était comme une prémonition. Nous en parlions des mois avant que cela ne devienne une réalité. Alors qui sait ? Peut-être l’aurions-nous fait, oui.
“La fiction, la SF et l’univers fantasy sont notre principale source d’inspiration.”
Lorsque l’on prête attention à vos textes, il est évident que l’on écoute une bande son pour Magic The Gathering ou les jeux de D&D … On a en tête l’imagerie de Frazetta ou de Ken Kelly. Dans quelle mesure l’Heroic Fantasy est-elle une source d’inspiration pour vous ?
Sebastian Baltes : Avant que quelqu’un ne réponde, je voudrais dire que juste avant que cette interview ne commence, je jouais à Magic The Gathering et j’écoutais un podcast de D&D. (Tout le monde rit)
Zach Wheeler : Avec Skulldozer, nos campagnes de D&D étaient notre principale source d’inspiration pour nos paroles. Aujourd’hui, nous puisons notre influence dans beaucoup de sources différentes, comme d’autres podcasts D&D, toutes sortes de films…
Tom Polzine: Nous utilisons beaucoup la fantaisie ou la fiction, pas seulement D&D. Par exemple, Disco Elysium était un super jeu qui nous a inspiré quelques chansons. La fiction, la SF et les univers fantastiques sontr notre principale source d’inspiration. Parfois, c’est le jeu vidéo, parfois le film… Cela peut être n’importe quoi, mais l’univers fantasy est généralement le point de départ.
N’est-ce pas une façon détournée de parler de vos propres sentiments à travers des personnages de fiction… sans trop en dévoiler personnellement ?
Tom Polzine : Oui, c’est une façon de cacher un peu de soi, mais aussi d’exprimer ce que l’on ressent d’une façon qui est peut-être… plus cool.
Zach Wheeler : C’est l’équivalent de « mon ami a ce problème. Je n’ai pas ce problème, mais si tu prétends que mon ami a ce problème… « . Nos personnages chevauchent un dragon avec une épée en feu, mais ils ont quand même des sentiments (rires).
“L’avantage d’être un groupe de NAshville, c’est que nous sommes entourés de musiciens de très haut niveau. C’est vraiment cool de venir d’ici.”
Vous venez de Nashville Music City, la ville des innombrables Honky Tonks sur Broadway. Il doit y avoir de la musique sept sur sept partout. Cela a-t-il aidé ou influencé votre façon de faire de la musique ? Quelle différence cela fait-il ? De mon point de vue, la pression doit être forte. Tout le monde à Nashville n’est-il pas musicien ?
Sebastian Baltes : Personnellement, cela me pousse à devenir un meilleur musicien. Je travaille dans un bar et la plupart des nuits, je suis là à voir de la musique country, de la musique pop, du jazz, du funk, etc. Et il y a bien plus que de la musique country à Nashville. Je pense que cela te pousse à t’améliorer, à t’entraîner davantage et à te concentrer sur ton instrument.
Tom Polzine : Je ne ressens pas trop la pression parce que ce que nous faisons n’est pas représentatif de la majorité des musiciens de Nashville. L’avantage d’être ici, c’est que nous sommes entourés de musiciens de très haut niveau. On reçoit de bons conseils à la moindre question sur la façon d’enregistrer quelque chose, ou sur le matériel à utiliser… mais il n’y a pas de pression à faire comme eux. Nous sommes Howling Giant et nous jouons notre propre musique. Et dans notre domaine, nous sommes plutôt bons. Il y a quelques groupes que nous respectons vraiment et plus qu’une rivalité, il y a cette sous-culture vraiment cool au sein de la scène de Nashville. Il y a cette inspiration pour essayer des choses et apprendre d’autres musiciens qui ont un niveau de compétence et d’expertise vraiment élevé. Nashville est vraiment un endroit cool d’où venir. Je dirais aussi qu’à Nashville, on met l’accent sur l’écriture d’une chanson. Contrairement à certains groupes qui se concentrent sur le shred, les riffs, ou le fait de faire quelque chose de vraiment unique… à Nashville, il s’agit de pondre une chanson avec une vraie accroche, une mélodie forte. En côtoyant autant d’auteurs-compositeurs, nous nous sommes peut-être concentrés sur notre métier d’une manière un peu différente de celle de certains groupes.
Certains groupes oublient complètement le pouvoir de l’accroche. En voulant sonner si particulier, ils en oublient le hook. C’est ce qui fait qu’on retient la musique et qu’on la siffle sous la douche. Il n’y a pas de honte à cela ! De nos jours, on se concentre sur le riff, mais on oublie la mélodie…
Tom Polzine : Je pense que les deux sont importants. Certains groupes parviennent très bien à créer une ambiance, un sentiment ET un riff. C’est très important. Mais je dirais que nous avons surtout essayé d’écrire des mélodies et des chansons bien ficelées.
Zach Wheeler : Et une mélodie vocale n’a pas besoin d’être l’accroche à tout moment. Parfois, le riff EST l’accroche, tant que tu crées une certaine familiarité et quelque chose de mémorable. Il y a beaucoup de groupes dont les chanteurs crient tout le temps, mais qui ont quand même des accroches dans leur chanson.
En parlant d’autres influences… Sebastian, ton père est bassiste dans un groupe de heavy metal plus que célèbre en Allemagne et en Europe, Accept. Est-il l’un de tes mentors ?
Sebastian Baltes: Quand j’étais petit, lui et le groupe étaient en hiatus. Il a donc toujours été là quand j’étais plus jeune. Il a recommencé à faire des tournées en 2011, quand je quittais l’école. Ça parait fou, mais la musique c’est son travail. J’ai toujours aimé son jeu et il a toujours été une source d’inspiration pour moi. Lors de notre dernière tournée européenne, nous étions tous les deux en Europe en même temps. C’était un moment magique pour moi.
En tant que personne ayant un pied sur les deux continents, vois-tu une différence dans la façon dont le heavy metal est joué en Europe et aux États-Unis ?
Sebastian Baltes: Je trouve que la scène metal européenne est plus soutenue que la scène américaine. Je pense qu’il y a toujours plus de gens qui viennent aux concerts et qui soutiennent les scènes locales. C’est ce qui s’est passé pour nous lors de notre première tournée européenne. Nous n’étions jamais venus ici auparavant et les gens sont venus à nos concerts, ce qui signifie beaucoup. Il y a certainement une tonne de différences ; la nourriture et la restauration sont probablement les plus notables (rires).
Tom Polzine: Je voudrais souligner que c’était notre première en Europe et que nous avons en effet vécus quelques concerts mémorables. C’était impressionnant à voir. Et il y en a eu d’autres où l’affluence était plus faible, car nous développons notre fanbase ici. Pour moi, il est difficile de comparer l’Europe aux États-Unis. Même si certaines personnes disent que l’Europe est meilleure pour la musique underground je ne sais pas si je suis d’accord avec ça. Je pense que nous avons connu une forte croissance aux États-Unis, du là où nous sommes allés. Je veux donc revenir à la scène underground américaine. Les gens essayent vraiment de la soutenir et nous la voyons se construire et se développer.
Une nouvelle tournée européenne est-elle prévue ?
Zach Wheeler : Nous sommes en train de discuter avec notre booker en Europe à propos des options qui s’offrent à nous. Nous avons en projet de petites tournées pendant l’été aux Etats-Unis et probablement une autre tournée aux Etats-Unis dans d’autres endroits en septembre. Ils étudient les options pour l’Europe à partir d’octobre. Si nous n’y arrivons pas d’ici la fin de l’année, nous espérons une tournée au début du printemps 2025.
L’automne dernier, vous avez testé votre popularité dans les villes européennes. Je vous ai vus au Desert Fest. J’ai été submergé par votre énergie et la ferveur de votre public ! Les gens connaissaient vos paroles par coeur ! Pour des gars qui viennent en Europe pour la première fois, je vous tire mon chapeau !
Tom Polzine : Le Desertfest était génial. On savait que ça serait bien mais le concert a dépassé nos attentes, car le public était très interactif. J’ai senti que les gens étaient attentifs, qu’ils écoutaient vraiment et qu’ils dansaient. Non seulement le public était nombreux, mais j’ai eu l’impression qu’il y avait une forte énergie et une forte connexion dans cette salle. C’était vraiment cool.
Zach Wheeler: C’était aussi spécial parce que c’était le dernier concert de la tournée, donc c’était comme une célébration. C’était vraiment cool de terminer dans un festival aussi emblématique.
« Nous travaillons dur, nous écrivons beaucoup et nous enregistrons beaucoup. «
Un débat est en cours au sein de l’équipe The Heavy Chronicles : Quelle est la meilleure reprise de « Godzilla » ? Celle de Fu Manchu ou la votre avec Bob Balch ? Alors dans quelle équipe êtes-vous ?
Tom Polzine : Eh bien, la barre a été placée assez haut parce qu’il en existe de très bonnes versions. Et celle de Fu Manchu est l’une des meilleures. Nous avions commencé à jouer « Working Man » de Rush pour nous amuser pendant nos streams. Puis nous avions envisagé de l’enregistrer. Et là tu as Fu Manchu qui joue la reprise de Working Man de Rush! Je me suis dit : « Merde ! ils ont toujours de l’avance sur nous ! » (Rires) Mais peut-être que notre prochaine étape sera d’apprendre quelques morceaux de Fu Manchu, comme une reprise de « Evil Eye ».
Sebastian Baltes: De toute façon, c’est Bob Balch qui gagne, vous savez, il est sur les deux morceaux !
Tu viens de me dire que vous êtes en studio en ce moment… Est-ce que vous travaillez sur votre prochain album ? Eu est-ce que nous allons avoir d’autres surprises ?
Zach Wheeler : Nous travaillons sur de la nouvelle musique, oui. Pour ce qui est de la date de sortie, ce n’est certainement pas cette année. À mon avis, ce sera en 2025. C’est un projet de grande envergure, et nous voulons être sûrs que tout se passe bien. Nous passons autant de temps que possible en studio. Je pense qu’il s’est écoulé environ quatre ans entre les deux derniers albums. Nous avons fait quelques petits EPs entre temps, mais nous essayons d’avoir des sorties un peu plus rapprochées, au moins les principaux albums.
Tom Polzine : Ce qu’on peut te dire, c’est que nous travaillons dur, nous écrivons beaucoup et nous enregistrons beaucoup. Nous ne pouvons pas vraiment en dire plus pour l’instant, et nous ne pouvons pas vraiment donner de calendrier.
Retrouvez Howling Giant sur leur site, Bandcamp, Facebook, Instagram et plus encore. Leur nouvel album « Glass Future » est disponible chez Magnetic Eye Records.
Last modified: 2 mai 2024