Dans le paysage stoner doom européen actuel, DOPELORD font désormais figure de groupe majeur et incontournable. S’étant forgé un son désormais reconnaissable aux premiers riffs, « Songs For Satan » n’est pourtant que leur cinquième album.
« Allez, encore un album de doom qui cause de Satan. » Voilà la réaction moyenne aperçue ces derniers temps, sans rien comprendre ni à ce que le groupe raconte, ni à ce que signifie le terme satanique utilisé par Dopelord. Comme la paresse intellectuelle est plus que jamais de mise et que lire plus de trois lignes de liner notes est trop compliqué, laissons tomber les débats stériles avec les trolls et penchons-nous sur ce superbe album.
Y a-t-il meilleure façon de s’insurger contre l’état de son pays (à part tout cramer) que d’en faire un album ? C’est en tout cas la façon dont les polonais de Dopelord ont choisi d’aborder les choses dans cette nouvelle galette. Le contexte politique polonais, gangréné par la secte séculaire du catholicisme, et qui a permis à l’extrême droite de s’emparer du pouvoir et de nuire à la liberté de vivre, devrait nous amener à réfléchir sur ce qui se passe dans notre pays, quel qu’il soit, vu la montée inquiétante et décomplexée des fachos et xénophobes un peu partout dans le monde.
Dopelord ont choisi d’évoquer le sujet sous la forme musicale qui leur sied, tout en lourdeur et dans un doom qu’ils sont les rares à perpétuer. Bon, et cette histoire de satanisme ? Contrairement au premier degré qui serait de croire en Satan comme des centaines de millions de lobotomisés croient en un ami imaginaire, le satanisme de Dopelord est celui de Lavey, qui pousse à encourager et à mettre en valeur ses préférences individuelles, à la célébration de l’individualité sans hypocrisie, de la solidarité sans pitié. En clair, le culte de soi et non d’une fable.
C’est par ce biais détourné que le groupe peut parler des méfaits de l’église et de ses positions rétrogrades à l’encontre d’une société qui essaie pourtant de se débarrasser du joug religieux et de vivre « à l’occidentale ». Mais la manipulation des masses n’est pas prête de s’arrêter, tant qu’un réveil collectif n’aura pas lieu…
Musicalement, le quatuor polonais pousse sa formule plus en avant que sur son précédent enregistrement « Sign Of The Devil » sur lequel l’évolution était déjà notable, particulièrement sur le travail vocal. Piotrek Zin ne se cache plus derrière des effets et le résultat n’en est que plus magistral tant il s’impose comme un chanteur de premier plan. La section rythmique est loin d’être en reste, les riffs massues et le tabassage des fûts ne vous laisseront jamais un moment de répit, votre nuque n’arrivera jamais à endurer jusqu’au bout ce que le groupe vous assène.
Heureusement, des passages plus éthérés viennent calmer les chevaux et reprendre son souffle, avant de repartir de plus belle et de vous entraîner dans son sillage, jusqu’à ce que vous réalisiez à quel point cette lutte est nécessaire. La montée en puissance et en tension au fil des titres laisse transparaître cette volonté d’en découdre et de pousser un vent de révolte qui ne doit pas s’estomper avec la fin de l’album, raison pour laquelle « Songs For Satan » s’achève sur le retour de « Night Of The Witch », afin que la boucle ne s’arrête pas.
Plus qu’un simple album de doom, Dopelord envoie un message fort à travers ce « Songs For Satan », que chacun devrait saisir : REVEILLEZ-VOUS ET CROYEZ EN VOUS !
Last modified: 8 novembre 2023