Mondo Generator et moi c’est une longue histoire. J’ai débarqué dans l’univers stoner par le biais du punk et donc, ma porte d’entrée dans ce merveilleux monde s’appelle Nick Oliveri. Et si depuis bientôt 15 ans, j’ai eu le temps de rattraper tous les classiques et d’étendre mes horizons musicaux dans toutes les directions, j’ai toujours gardé une place spécifique pour Mondo Generator dans mon cœur.
Pourtant, ce n’est pas en fanboy que j’écris ces lignes car voyez-vous, Mondo Generator n’a pas toujours su convertir l’essai. Si tous les albums ont un certain charme à mes yeux, le groupe a longtemps couru après son line-up, celui qui ferait mouche, serait prolifique, inspiré, technique et dédié. Souvent, les albums ont alterné entre moments de bravoure et, avouons-le, un peu de remplissage.
Il fallait donc des mecs capables d’aiguiller Nick dans ses choix, le retrancher dans ses limites ou extraire la moelle de ce qui fait que Nick est Nick. Or, en 2019 sortait “Fuck It”, l’album qui ENFIN réussissait ce tour de force qu’on attendait depuis “Cocaïne Rodeo”. Un Mondo Generator revigoré autour des deux Mike, l’un apportant hargne et maîtrise, l’autre apportant une touche prog et expérimental, tous deux restant parfaitement capables de se mettre au service des morceaux, de la voix inimitable de Nick et de ses lignes de basses pas si conventionnelles. Alors quand le successeur de “Fuck It” débarque enfin dans ma boîte mail, je n’ai pas attendu de recevoir mon vinyle en édition limitée. J’ai plongé tête la première dans ces 29 minutes avec quelques appréhensions, fort heureusement très vite dissipées.
D’abord, l’album nous accueille avec ce petit discours rageur qui rappelle forcément les intros de “Cocaine Rodeo” et de “A Drug Problem That Never Existed”, un côté très années 2000’s des plus plaisants. Ensuite, on va enchainer les brûlots punk hardcore avec cette petite touche proggy / noise rock tout du long. Les morceaux sont brefs, vont droit au but, les riffs ont tous ce petit quelque chose pour nous titiller, les leads guitares sont toujours très bien senties sans être trop envahissantes, la production est sale mais massive et le chant de Nick n’a jamais été aussi bien mis en valeur avec ce grain de distorsion naturelle mais jamais exagérée en post production.
Imaginez si NoMeansNo avait décidé de fricoter avec Black Flag et que le tout gardait la cool attitude de la scène du désert californien. C’est exactement ce qu’on nous propose là.
Que retenir dès lors de ces 29 minutes? Le riff dantesque de “Death March” qui nous renvoie directement aux bons vieux “Like a Bomb” ou “Simple Exploding Man”! Mais s’il faut choisir un highlight, ce sera le mid tempo saccadé “Conspiracy (fact or theory)”. D’abord parce que c’est le seul titre où Nick utilise toute sa panoplie vocale (depuis le spoken word à la Rollins, en passant par le cri complètement décérébré, la protestation hargneuse et le chant plus mélodique). Ensuite, si ce titre m’a marqué c’est aussi par sa thématique. Les confinements des dernières années ont eu un effet assez négatif sur Nick qui n’a pas hésité à s’épancher longuement sur les réseaux sociaux, parfois de manière exagérée, parfois à la limite du complotisme mais toujours avec cette sincérité et cette naïveté qui le caractérise.
Si “Kyuss Dies” était une remise en question personnelle sur “Fuck It”, c’est cette fois-ci “Conspiracy” qui fait office d’introspection et d’auto-critique cathartique. Bon et puis enchainer avec “I Want Out”, c’est une suite logique dans la thématique. Et le solo de guitare harmonisé sur le final est d’une grande qualité, impossible de ne pas mentionner celui-là.
À l’écoute, on ne s’ennuie jamais en 29 minutes mais on remarque aussi une construction d’album assez maligne. Ainsi les 3 ou 4 premiers titres “pedal to the metal” n’ont pour objectif que de nous mettre le pied à l’étrier avant ce trio d’une qualité nettement supérieur (Death March / Conspiracy / I Want Out) et ensuite, les deux derniers titres sont l’occasion d’une autre accélération pour en finir de la meilleure des façons avec tout le final de “For A Day” et l’un des meilleurs build-ups de l’ami Mike Pygmie à la guitare fuzzy, douce et abrasive, rock and roll mais osant la dissonance et la surprise.
Beaucoup trouveront que 9 titres, c’est trop peu. Certains diront que ça manque de gros hits. Enfin, je sais qu’une partie des auditeurs dira qu’on a entendu cet album 100 fois de la part de Nick et sa bande. Mais je crois que c’est bien plus subtil. Nick fait du Nick, évidemment, et les Mike apportent leur pierre à un édifice dont les fondations sont intouchables, dès lors on ne peut attendre de révolution.
Après tout Nick est la définition même du stoner punk et c’est ce qu’il nous livre. Il faut plutôt analyser cet album au sein de l’œuvre complète du bonhomme (et de ses deux compères) et se demander : est-on ici face à l’une des toutes meilleures productions de Mondo Generator? Assurément. Entre le renouveau et la vigueur retrouvée sur “Fuck It” et la hargne et la maîtrise de “We Stand Against You” mon coeur balance je l’avoue, à vous de faire votre choix entre deux albums majeurs de l’homme au sourire de maniaque.
Last modified: 14 octobre 2023