Ah les années 80. Les néons, les slashers au cinéma, la mauvaise 3D, les couleurs fluo, les architectures toutes carrées, le high gain qui envahit les amplis, les rêves de voitures volantes… C’est une décennie kitsch mais touchante qui aura aussi bien marqué l’histoire avec l’effondrement de l’URSS et du mur de Berlin que la culture et la musique avec l’arrivée du hardcore, les prémices du black metal, du grunge, et donc la naissance du funeral doom.
Endtime nous présente un premier album qui se veut bien plus qu’un hommage aux 80’s. Ici c’est carrément une lettre d’amour fleur bleue suivie d’un plateau repas micro-ondé, mangé devant la VHS d’Evil Dead 2 par un fan de D&D avec une coiffure à la Robert Smith, et sa nana permanentée et leggings flashy, Air Jordan aux pieds. La panoplie complète est là, au point que certains verront dans cet album de revival doom une parodie sans saveur. Pourtant on sent un amour sincère du genre et une science de l’écriture qui me poussent à y revenir. Sur ces cinq titres, les guitares grasses nous assènent des riffs lents, massifs et fuzzy comme il se doit. Les larsens, samples introductifs, les orgues, cloches et autres artifices classiques du genre sont présents quand il faut sans jamais en faire trop. En un peu moins de 30 minutes, le groupe illustre sa connaissance fine des classiques du genre. La voix est éraillée comme il le faut, avec ce léger manque de puissance et ce mix en retrait typiques du genre à l’époque.
On serait donc tenté de réduire « Impending Doom » à ce simple constat de l’hommage. Pourtant, au fil des écoutes, on se rend compte des autres atouts de ce disque. De part sa production d’abord, qui sonne vintage mais incroyablement massive grâce à une batterie mixée de manière surprenante de sorte que les lignes de basse et de guitare occupent 90% du spectre sonore. Le grain de ces lignes étant particulièrement travaillé pour sonner comme quatre full stacks dans chacune de vos oreilles. On remarque aussi cette guitare presque Hommienne sur “They Live”. On note les différentes textures de claviers utilisées et les quelques incartades d’une basse ronde et voluptueuse. On constate à quel point la voix est parfaitement travaillée avec ce delay quasi permanent et l’absence d’harmonies vocales. On note la fin en apothéose assourdissante de l’album.
Mais surtout, surtout, on voit les qualités d’écriture. Parce que s’il est bien un point qui m’a souvent fait snober les grands parrains du genre de cette décennie, ce sont bien les tâtonnements dans l’écriture. Souvent, ce doom se perdait en morceaux trop longs ou trop simplistes, en solo trop mis en avant ou au contraire trop expéditifs. Ici, tout est savamment pensé. Les riffs sont répétés juste ce qu’il faut pour ne pas lasser, tout en restant efficaces, les éléments distinctifs arrivent juste assez souvent pour ne pas nuire à l’homogénéité et la puissance de cet opus, tout en donnant à chaque titre sa personnalité.
Les mecs de Endtime signent leur premier album, il est concis mais ils ont passé des années à le peaufiner et cela se sent. Si certains n’adhèreront pas à cette esthétique néon doom antinomique, la qualité de cet album est assez difficile à nier. Et je me surprends à trouver là un album de doom vers lequel je reviens encore et encore, bravo.
Last modified: 25 mars 2022