Si les vagues successives de nostalgie musicale font remonter à la surface nombre de sous-genres et de groupes n’ayant connu qu’un succès d’estime (au mieux), c’est souvent une marée de médiocrité qui s’étale finalement à nos pieds, peu de nouveaux groupes essayant de reproduire une formule qu’ils n’ont pas connu arrivent à livrer des albums intéressants ou simplement bien faits.
Alors que c’est le retour des 90’s (enfin !) à grand renforts de reformations et sortie de la retraite de groupes que les moins de 40 ans n’ont probablement jamais entendu, il est des mouvements que seuls les acharnés de l’underground se souviennent, dont les Riot Grrrl. C’est pourtant en dignes héritières de cette lutte pour l’égalité des femmes que SheWolf sont apparues, quelque part — de nulle part — en 2016. Le trio français a sorti en juin son deuxième album « Parasite », lequel fait honneur à ses nombreuses influences et fait suite au déjà excellent « Sorry, Not Sorry » paru en 2018.
Poursuivant leurs explorations sociales, SheWolf abordent des thèmes que chacun et chacune pourra interpréter à sa façon mais il est difficile de ne pas y voir une satire de notre monde, entre aliénation au travail, mépris, patriarcat, maltraitance et révolte des femmes. Le tout sur des ambiances allant de l’abrasif au mélodique, mêlant L7 à Hole, Babes In Toyland aux Lunachicks, sans oublier la prêtresse Queen Adrena, soit le meilleur de ce qui s’est fait il y a plusieurs décennies mais que quasiment aucun groupe n’a osé affronter ou du moins avec succès. Mais SheWolf sont faites d’une autre bois, de celui qui a emmagasiné tous les sons de ces groupes et s’en est servi pour devenir plus fort : leur musique paraît non pas inspirée ou copiée, mais proprement dans la droite lignée des groupes précités.
La facilité avec laquelle SheWolf passent d’un registre à l’autre est déconcertante : le triplé introductif « The escape/Be Happy/Monster », vifs brûlots punk arrachés où la guitare malmenée et la voix décharnée servent des paroles de désespoir au rythme d’une batterie épileptique, auquel s’enchaînent des morceaux desquels on croirait voir surgir une Courtney Love sobre et au sommet de son art, tant la voix se joue des registres et nous emporte.
Ne vous y trompez pas, SheWolf ne sonnent jamais passéistes et se placent aux côtés des Espagnols de Rosy Finch pour faire renaître tel un Phénix les Riot Grrrl et faire entendre leurs voix. Si vous aimez votre rock sale, brut de décoffrage, craché au visage et joué sans artifice, il est impensable que vous passiez à côté de « Parasite ».
Last modified: 4 octobre 2021