Blues Funeral Recordings est une maison de bon goût. Outre ce nom en hommage au cultissime album de Mark Lanegan, le label propose des initiatives très intéressantes avec les fameux abonnements PostWax. Mais soyons honnêtes, ce qui compte pour un label c’est son roster, et autour de Lowrider, Elder, Lord Buffalo ou Domkraft se trouve désormais Somnuri. Décryptage de leur dernier opus « Nefarious Wave ».
Le combo nous vient de New York (Brooklyn) et cela se sent dès les premières notes de ce nouvel album. En effet, une énergie et des racines très New York Hardcore se font sentir que ce soit par l’agressivité des riffs, le mix de la batterie, ou encore les parties vocales criées quelque part entre growls et chant plus blackened death. Mais attends attends, alors pourquoi je chronique cet album chez The Heavy Chronicles? Et bien simplement parce que ce petit élan hardcore n’est qu’une facette d’un groupe proposant un sludge prog résolument moderne. Vraisemblablement bercé à Mastodon ou Torche, on retrouvera les plans prog et parfois atmosphériques ainsi que les chœurs typiques des premiers, et l’énergie brute sur chant ultra mélo et 90’s des seconds.
Somnuri maîtrise son sujet et ses influences, et pourrait vite tomber dans le prévisible mais, de par cet ancrage new-yorkais, le groupe apporte une touche personnelle nécessaire pour ce type de productions parfois un peu trop caricaturales. Parmi les spécificités du combo, je note l’absence de parties de lead guitares harmonisées typique du genre, mais aussi une propension à aller dans le côté bourrin et obscur de la force sans aucun scrupule ni artifice. On évite également le piège des morceaux un peu trop longs, trop psychédéliques ou trop posés typiques du genre. On s’autorise des plans de batterie presque blastée, bref, on sort du carcan bien trop prévisible du sludge moderne actuel. Ainsi après la parenthèse plus posée « Desire Lines » , c’est le galopant et emprunt de Thrash « Beyond Your Last Breath » qui nous remettra le pied à l’étrier.
Je note également une production parfaitement équilibrée, comme je m’y suis habitué sur les sorties Blues Funeral. Suffisamment moderne, elle permet à tous les instruments de briller et à chaque détail d’être audible sans jamais paraître pompeuse ou nous faire perdre ce sentiment d’urgence qui parcourt l’album. Je regrette ainsi parfois que certains passages perdent le côté épique qui leur tendait les bras mais il faut reconnaître que l’on sort de l’écoute de ce bien nommé « Nefarious Wave » parfaitement rassasié.
Hardcore encore est dans le son de basse qui nous accueille sur « The Lights Go Out » : loin des sons hyper fuzzy ou lourds et étouffés du genre, on sent poindre la bonne vieille tête Ampeg pour un morceau qui se voudra plus mid tempo, tout en tension et dynamique. Et quel pont, mes amis ! Entre les riffs tout en sublimes dissonances, la basse « straight in your face » et les voix criées et chantées se mélangeant parfaitement, on a là le point culminant de cet album ! Vous vous demandiez si j’exagérais avec le côté New York Hardcore? Attendez d’entendre « In The Grey » et son intro qui troque la boue du bayou contre des larsens entrecoupés rappelant les mouettes des docks. Et tout ça pour mieux nous matraquer la gueule à base de riffs acérés. Manque plus que le singalong à base de « si si la famille » et on y est !
Cet album de Somnuri est donc un bon, voire très bon cru pour 2021, transpirant de bonnes intentions et proposant une identité sonore plus marquée que leur album précédent. Il laisse entrevoir de grandes choses pour ces Yankees à condition de lâcher encore plus les chevaux sur le prochain.
Last modified: 1 juin 2021