BATTALIONS ou le cours de rattrapage version tarte dans la gueule et glaviot dans ton café. Avec « Pure Humber Sludge », Battalions nous offre une version remasterisée de ses premiers EPs, l’occasion de revenir sur le début de carrière du combo du Yorkshire (petits chiens / gros son).
BATTALIONS, pour ceux au fond de la classe, c’est un groupe développant un sludge old school, de prime abord très efficace et basique. Mais si on se se penche un peu trop sur leur cas, on réalise bien vite qu’il ne s’agit pas là d’un énième hommage à EyeHateGod ou Acid King, car il y a chez eux une volonté d’ouverture discrète par petites touches disséminées dans les titres.
Parfois c’est le chant guttural qui lorgne sur le black metal, parfois c’est une syncopation musicale plus proche d’une breakdown de coreux que d’une respiration sale façon Melvins. Parfois encore, c’est ce côté hymne qui inciterait presque au singalong. Et insidieusement, on se met à adorer ce projet, à lui louer des qualités jusqu’alors insoupçonnées, à y voir les seuls représentants modernes d’un son presque archaïque. Coté six cordes, certaines lignes de guitares ajoutent une dimension presque rock’n’roll flirtant avec un hard rock décomplexé. On serait presque tentés d’y voir une forme Kvelertak intégriste se refusant un succès trop grand public (comparaison qui tient d’ailleurs jusque dans le logo du groupe). Côté quatre cordes et batterie, c’est gras, c’est puissant et sans fioritures. Unapologetic comme disent justement les anglais.
Une fois ce décor planté, que retenir de ce remaster de BATTALIONS ? La production bénéficie forcément de ce travail, et si certains trouveront qu’on perd en partie le charme d’une production marécageuse à petit budget, d’autres se délecteront de pouvoir profiter d’avantage des arrangements soignés sur les parties de guitares leads. Oui oui, on parle d’arrangements soignés sur un album de sludge old school, cette fois c’est sûr 2020 déconne à plein tubes.
Puisqu’il s’agit de la juxtaposition de deux EPs, on y trouvera logiquement deux ambiances. La première est plus classique et démontre que BATTALIONS connaît les codes du genre tout en apposant ces aspects subtilement black ou rock n’roll. La deuxième partie reprend les mêmes bases tout en mettant en avant une qualité d’écriture plus nette avec des sonorités presque grunge par moment. De mon point de vue, c’est cette seconde partie la plus mémorable, bien que plus déroutante ou inégale. Les traditionalistes auront tendance à préférer le cadrage et le sens de la discipline de la première moitié. Finalement, voilà de quoi mettre tout le monde d’accord. Mes coups de cœur ? « Deadbeat » et « Skin Jon », sans hésiter une seconde.
On sort des écoutes répétées de « Pure Humber Sludge » avec un sentiment inédit : celui d’avoir affaire à un album qui aurait pu sortir en 98 tout en lui louant une modernité inespérée. Impossible d’adresser le moindre reproche à BATTALIONS, le groupe maîtrise parfaitement son sujet et c’est un auditeur comblé qui écrit ces quelques lignes. Il faut dire que sludge old school et personnalité forte vont rarement de pair, et qu’on ne saurait que saluer cette prouesse réalisée par Battalions.
Last modified: 3 décembre 2020