Réveil difficile en ce dernier jour de DESERTFEST BELGIUM, du fait des bûches prises dans la tête la veille. Mais ça devrait être beaucoup plus tranquille aujourd’hui vu la programmation essentiellement psychédélique et stoner… (PHOTOS : Sandrine Correia)
Nous arrivons sur la fin de ANCESTORS, pour un dernier titre aux sonorités très lourdes, envoûtantes et intrigantes. Charmé en à peine 30 secondes, je me dis qu’il faut que je me rapproche, mais c’est malheureusement déjà fini. Je me dis d’aller réécouter ça sur disque une fois rentré au pays. C’était pas prévu, et c’était une sacré surprise ! En revanche une escale était prévue pour HEADS, mais c’est au final plus difficile que prévu de rentrer dans le bain. J’ai vraiment du mal avec cette petite scène près du bar où le son n’est jamais satisfaisant et où il est impossible de se placer correctement… Malgré les éloges fait sur le groupe, je reste dubitatif.
Direction MY SLEEPING KARMA pour une dose de positivisme. Toujours aussi détendus, beaux, et souriants, les allemands montent sur scène tranquillement et remercient chaleureusement l’assemblée alors qu’aucune note n’a été jouée. Ça met de bonne humeur d’emblée. La suite on la connaît : un enchaînement de titres cultes dans un ordre que je ne pourrai jamais retranscrire avec précision tant ils sont parfaitement liés les uns aux autres. My Sleeping Karma fait partie de ces groupes qui fait rarement des pauses entre les morceaux, mais lorsqu’ils en font c’est pour communiquer avec le public, les remercier, parler du lieu dans lequel ils jouent avec plaisir. Le niveau sonore me paraît moins fort qu’hier, mais peut-être aussi parce que leur musique est bien plus douce et planante. Acclamés tout du long, ils repartent comme ils sont venus : en maître incontestés de la zénitude stonerisée. Trop d’amour. Et les groupes suivants vont continuer de nous emporter dans leurs bonnes vibes et leur originalité.
Nous montons d’un étage pour aller voir THE DEVIL AND THE ALMIGHTY BLUES, encore une fois complètement par hasard… Et c’est encore une fois une bonne découverte ! Compositions intéressantes passant comme son nom l’indique par plusieurs nuances de blues, parfois agressives, parfois oniriques, mais aussi des passages plus country, ou tout simplement rock aux sonorités très américaines, venues du fin fond du Far West. Ça casse des dents avec classe, mais je suis trop impatient de voir le groupe suivant pour rester jusqu’au bout.
Depuis cette torride soirée à Paris l’été dernier, il me tardait de me faire de nouveau engluer par le son d’ACID KING. Et ça n’a pas loupé ! Le trio américain joue toujours aussi lourdement (sans pour autant être assourdissant) et toujours aussi leeeeentement… Mais bientôt un problème sur la basse surgit, on se retrouve donc avec un duo batterie / guitare pendant quelques longues secondes. Mais loin de dénaturer la musique par l’absence de ses notes groovy, le bassiste s’occupe du problème avec le plus grand des calmes pendant que le set continue en duo guitare / batterie. Problème résolu, puis c’est au tour de la guitare d’avoir un souci. Lori n’en démord pas pour autant et continue à ensorceler la salle de sa voix inquiétante qui résonne dans l’air, pendant qu’un roadie s’occupe de régler ça à toute vitesse. Elle récupère finalement sa Gibson et recommence à balancer les riffs sous les applaudissements d’un public composé visiblement de fanatiques, admiratifs de ce professionnalisme et cette réactivité. Rapides mais chaleureux remerciements en retour, avant de finir un set avec « Silent Circle », qui a le don de me rendre fou, et « Electric Machine ». Malgré les soucis techniques, c’était un show mené de bout en bout avec classe et ça fait plaisir de prendre un tel pavé dans les oreilles !
Passage rapide devant EAGLE TWIN à côté de ce bar que je ne porte toujours pas dans mon coeur. J’avais vu cette formation par hasard lors de mon tout premier Hellfest en 2012, mais le souvenir qu’il me restait d’eux était complètement différent de ce que j’ai pu voir sur les derniers titres de ce set. Imaginez un duo sludge doom guitare / batterie hyper massif et qui groove, exécuté par deux bûcherons américains, utilisant beaucoup de chants chamaniques (presque diaphoniques) hypnotisants et parlant d’esprits du Grand Nord, de la nature et de diverses légendes indiennes. Les membres ont aussi la particularité de fabriquer eux-mêmes leurs instruments, amplis et pédales d’effets. Encore un groupe qu’il faut que je découvre plus en détails en studio. Petite pause avant le dernier enchaînement de la soirée, mais pas le plus épuisant du festival.
Direction ELDER, les génies incontestés du stoner prog et ayant remporté selon moi le prix du meilleur album de l’année 2017. Ils étaient visiblement très attendus ce soir, la salle est pleine à craquer et les gens semblent très content de revoir le trio qui a bien réussi sa mutation en quatuor. C’est un set très étonnant et changeant puisqu’il est entamé d’emblée par « Dead Roots Stirring » puis un bon nombre de tueries, dont le doublé parfait dudit dernier album « Reflections Of A Floating World », avec « Sanctuary » et « The Falling Veil » qui nous font voyager pendant près de 22 minutes. Les prodiges américains pètent littéralement des culs (même si j’ai entendu mieux l’été dernier à Paris), à tel point que j’en oublie d’aller voir le seul concert de luth du séjour par Jozef van Wissem… Dommage, mais en même temps tant pis. Quand on aime on ne compte pas. Et le temps ne signifie généralement plus rien lorsqu’on est face à Elder !
Mais je n’attends pas le dernier titre car encore une fois il faut partir pour se placer face à NAXATRAS, d’autres génies d’un autre genre de stoner, plus psychédélique, doux et aérien, découverts plus récemment pour ma part, et qui ont sorti un des meilleurs albums de cette année 2018 (sobrement intitulé « III ».) Un show light magnifique avec images 3D modernes, motifs géométriques, et couleurs très vives aux tons rose / noir / violet bizarrement très synth wave me fascine. Des paysages futuristes de montagnes défilent sur des quadrillages façon « Tron » et accentuent le côté onirique de la musique des grecs, et font de ce show le plus zen de la journée, avec un son tout à fait délectable.
Je file encore une fois avant la fin pour bien me placer pour le début d’AMENRA. Peu de temps après mon arrivée, il m’est impossible de changer de place dans la fosse : la mainstage est pleine à craquer pour son dernier concert du week-end. Devenu de véritables célébrités, les belges le sont encore plus à domicile et font se déplacer une foule de fans comme de curieux… et son lot de boulets qui viennent rapidement ruiner l’ambiance, comme presque à chaque fois j’ai envie de dire… Les bavardages ne cessent pas dans la moitié arrière de la salle lorsque les premières notes de « Boden » s’abattent sur nous. La setlist est d’ailleurs à peu près la même que celle du début d’année, avec son lot de titres du dernier album « Mass VI » (mais absence encore une fois de « A Solitary Reign », la plus belle et malheureusement la plus boudée de leur répertoire.) Les gens réclament du silence tout du long par des « chut », mais reçoivent en retour d’autres « chut » suivis de rires moqueurs de personnes ivres qui ne savent visiblement pas quoi faire de mieux. Ça me donne presque envie de quitter les lieux. Mais il est très difficile pour moi d’arrêter un show d’Amenra, car je finis toujours dans un état de transe noire incontrôlable. Une véritable communion avec Dieu, en plus mélancolique et haineuse.
J’arrive finalement à oublier les gens gênants autour, mais aussi que THE WELL jouait près du bar et que j’aurais vraiment aimé voir leur rock vintage chaleureux et rare, même si le changement radical d’ambiance ne l’aurait pas fait. Encore ce running order très embêtant… Mon âme vidée de toutes ses émotions négatives (ou au contraire bien remplie à cause du public médiocre du festival), le contrecoup du séjour me plonge dans un état de fatigue avancé qui me fait également zapper WHORES à l’étage, ainsi que l’afterparty ultime du week-end… Je n’avais inconsciemment peut-être pas très envie de finir ce festival sur de la violence bête et méchante. C’est donc sur les superbes notes de « Silver Needle / Golden Nail » que je quitte le complexe du Trix et le Deserfest Anvers, qui fut bien, mais loin d’être une expérience inoubliable, car parsemée de quelques gros bémols.
Pour beaucoup, ces points négatifs sont indépendants des organisateurs (disposition des lieux, gobelets non consignés qui finissent en pagaille par terre, public agaçant, choix restreint de bières, prix élevés etc.), mais un running order si chargé empêche de profiter pleinement des concerts, et c’est selon moi le plus gros des problèmes à résoudre. Dommage quand on voit une telle affiche avec autant de bons noms de la scène stoner et doom, mais aussi de plus en plus de black metal qui s’incruste dans la programmation de ce genre d’événement ! C’est plutôt une bonne nouvelle pour les amateurs du genre dont je fais partie, et peut-être que ça fera évoluer la scène et les mentalités, mais ça c’est un autre sujet…
Last modified: 4 janvier 2019