Une année s’est écoulée depuis le précédent passage à Bordeaux de deux formations françaises incontournables… Et pour cause, elles figurent à mon sens parmi les meilleures dans ce qui se fait actuellement en matière de black metal (si on peut vraiment les affilier à ce genre). Les parisiens de DÉLUGE avaient retourné le Void en janvier 2016, tandis que les Bordelais de THE GREAT OLD ONES (que je m’apprête à voir pour la 7ème fois) continuaient leur ascension effrénée, qui leur vaut aujourd’hui une réputation dignement méritée. Ce soir, nous aurons droit à un show d’une heure et demie retraçant leurs trois albums (déjà !) dans une salle déjà bien connue de certains : Le Fridge. (Illustration : Razort)
Mon dernier passage dans cette salle remonte à octobre dernier pour le retour des excellents Negura Bunget, déjà programmés par The Insane Legions deux ans plus tôt. Un des murs venait d’être abattu pour connecter la salle à un ancien local situé derrière. Ce soir, l’accès se fait par cette partie qui a triplé de volume, comptant désormais un second bar, des toilettes plus grandes, des tables éclairées à la bougie, décorations vintages… Beaucoup de monde s’est amassé devant l’entrée (on me dira plus tard que 150 personnes étaient présentes). Le temps de prendre un verre de vin (malheureusement bouchonné), et les Parisiens entament les hostilités.
La scène est située au niveau de l’ancienne fosse du Fridge et aurait mérité d’être surélevée, car depuis le fond de la salle nous ne discernons que de vagues lumières. Mon souvenir du passage de DÉLUGE au Void est assez flou. Beaucoup de monde et un show exécuté à toute vitesse, comme l’aurait fait un autre groupe auquel on les rattache souvent : les Lyonnais de Celeste. La formule est plus ou moins la même ce soir : passages calmes avec samples de pluie ou d’eau, le tout baigné de lumières bleues et jaunes, une guitare joue un air imbibé de reverb, puis c’est le chaos total. Blast, chant typé hardcore et black metal, stroboscopes, quelques mélodies envoûtantes au milieu de ce brouhaha, et des mid-tempos qui structurent le tout en chauffant efficacement la salle. Je ne discerne pas bien les titres car je ne connais pas suffisamment le groupe, mais tous semblent issus de leur unique et excellent album Æther. Les titres défilent avec une facilité d’exécution assez bluffante et avec un son plus que correct, le tout dans l’atmosphère épaisse créée par ce nouveau système de lumières et de fumigènes. On en reste bouche bée et émerveillés (plus que l’an dernier me concernant).
Un énorme poulpe de ferraille vient d’être amené sur scène et les backdrops arborant les sublimes dessins de Jeff Grimal viennent d’être dévoilés : THE GREAT OLD ONES ne vont pas tarder. Sous des lumières rouges statiques, le set commence par les premiers titres de EOD : A Tale of Darkness. Le son n’est pas encore bien réglé et des oreilles saignent à proximité. Les mélodies aériennes de « The Shadow Over Innsmouth » commencent à nous emmener loin au-dessus des océans, même si elles restent difficilement audibles. Les orgues de « The Ritual » quant à eux ne se font pas du tout entendre, ce qui me déçoit un peu car c’est selon moi l’un des meilleurs morceaux de l’album. L’enchaînement « Je ne suis pas fou / Antarctica » me ramène trois ans en arrière à l’Antirouille, lors de la sortie de Tekeli-li, lorsque l’album avait été joué à la perfection et en intégralité. C’est à ce moment que tout le monde semble se laisser porter par les vagues atmosphériques de la formation bordelaise : certains ferment les yeux, d’autres hochent la tête timidement, et certains dansent lentement comme pour se mettre dans l’ambiance d’une messe noire… Je remarque alors que le line up a changé : un nouveau guitariste et un nouveau bassiste ont respectivement remplacé Xabi et Sébastien. Je ne l’avais pas remarqué à cause des capuchons de prêtres, eux-même dissimulés dans les fumées. La suite se compose de titres de Al Azif et Tekeli-li, puis par les trois derniers titres de EOD dont le sublime « Mare Infinitum ». La fosse s’est vidée à mesure que la nuit s’avançait, et il ne reste désormais que les plus vaillants et résistants… lorsqu’un rappel est lancé ! Les Grands Anciens quittent les lieux en ayant joué une dernière beauté : « Jonas », issu de leur tout premier album sorti il y a déjà cinq ans.
Un show unique et à la hauteur de ce qu’on pouvait espérer d’un groupe qui n’a plus rien à prouver, malgré une qualité sonore à revoir. L’ambiance était au rendez-vous, et même si on ressort avec les tympans souffrants, nos yeux, eux, sont remplis d’étoiles. Pour un concert de black metal, un mardi soir pluvieux à Bordeaux, ça fait plaisir de voir autant de monde venu soutenir nos cinq confrères ainsi que les Parisiens de Déluge, car ces deux groupes ont de l’avenir. Retrouvez Déluge au Hellfest en juin, et The Great Old Ones au Motocultor (qui aura bien lieu) en août… et probablement sur d’autres dates d’ici là !
Last modified: 25 avril 2017