Suite et fin du fat report de ce HELLFEST 2014. Jusque là, on peut dire que ce week-end à Clisson a été relativement sportif, littéralement brûlant, et fort en poussière. On peut aussi dire que des groupes tels que Clutch, Mos Generator et Electric Wizard ont offert des performances éblouissantes. Mais c’est bel et bien en ce dernier jour que le taux d’allégresse général va atteindre son apogée. Bouclons cette édition 2014 de façon triomphante avec Black Sabbath, Turbonegro, Lowrider, Crowbar, Black Tusk, et bien d’autres. MERCI Hellfest pour le lot de gros son, de folie furieuse et surtout d’émotion. (PHOTOS : THC / Gaël Mathieu)
Qui l’eut cru ? Il est humainement possible de commencer le dernier jour du Hellfest EN PLEINE FORME. Bon, c’est vrai : se coucher à 23h la veille peut aider. Le soleil est une fois de plus au rendez-vous en ce troisième jour, avec quelques nuages pour tempérer nos ardeurs : toutes les conditions sont donc réunies pour démarrer la matinée dans un fantastique enchaînement de groupes vintage rock…
C’est donc pour un petit déj super healthy que je retrouve les enfants chéris de la vague blues rock 70’s, j’ai nommé BLUES PILLS. Comme pas mal de gens de mon entourage, j’étais moyennement emballée à l’idée de les voir jouer sur une des Mainstages. Au final, peu importe la taille de la scène : le quatuor met le feu grâce à la présence incroyable d’Elin Larsson et la virtuosité et le touché sans pareil de ses musiciens. La setlist a beau être beaucoup plus soul que rock (ça ne peut pas faire de mal, après deux jours de bourrinage intensif), le public montre un enthousiasme sincère quoiqu’il se passe. Public composé d’initiés, mais aussi d’un paquet de « bons gros métalleux » qui semblent vraiment se laisser porter par la performance. On sait tous qu’il n’y a rien de réellement original dans la musique de Blues Pills (ni dans celle de la plupart des groupes revival actuels, d’ailleurs), mais l’exécution est tellement parfaite, et le charisme de sa chanteuse tellement foudroyant, qu’ils sortent vraiment du lot. Espérons juste que leur talent ne sera pas totalement gâché par la machine marketing Nuclear Blast qui s’affaire dans l’ombre.
Aussitôt le concert terminé, direction la deuxième Mainstage pour retrouver SCORPION CHILD. Si ces (jeunes) hard rockeurs texans n’inventent rien, leur performance n’en est pas moins sexy et groovy, son point central étant leur magnétique frontman Aryn Jonathan. L’alliance de sa puissante voix soprano avec sa présence Plantienne (et les déhanchés qui vont avec) en font un vrai régal pour les oreilles… et les yeux. J’avoue que je serais incapable de vous décrire les autres membres du groupe, tant ce jeune homme bouffe l’écran. On tient là un beau croisement de Wolfmother et Soundgarden, mais qu’importe tout cela : ça fait du bien.
Next sur la liste, les mammouth de la Nouvelle-Orléans CROWBAR. Une fois de plus aujourd’hui, je me rends vers la Mainstage à reculons (mais sous un soleil de plomb et avec un bandana en guise de masque anti-poussière), car Crowbar est de ces groupes que je préfère tout de même voir dans un cadre un peu plus restreint. Malgré la distance qui nous sépare de la grande scène, mon collègue Pierre-Antoine et moi-même nous laissons totalement aller au son écrasant des papas du sludgecore, reprenant en choeur « High Rate Extinction », « All I had I Gave », « The Lasting Dose », et offrant une véritable démonstration de air guitar/air chant à nos voisins déroutés. Les morceaux des deux derniers albums envoient tout autant du lourd, mais rien ne nous émeut plus que le grand final sur « Planets Collide ». Et même si niveau atmosphère, c’était loin d’être le meilleur concert du week-end, on a pris notre fix de GRAS, et repartons avec un sourire béat en direction de la Valley…
La journée ayant très bien commencé en terme de sexiness grâce à Blues Pills et Scorpion Child, mon prochain rendez-vous n’est autre que le sublime quatuor berlinois ZODIAC (lesquels m’avaient soufflée au dernier Desertfest Londres). Après l’effet de surprise de la première fois, j’apprécie aujourd’hui pleinement le rock tout en finesse des Allemands. Cinq chansons suffisent à souffler un vent de fraîcheur salvateur sous cette Valley quelque peu étouffée par les riffs épais et la poussière… Ensorcelants au possible, les ZODIAC n’ont en revanche rien de froid, et saisissent chaque occasion pour communiquer avec nous, en toute simplicité et sympathie. Le ténébreux guitariste et chanteur Nick Van Delft établit en permanence l’eye contact avec les membres de son public, ce qui rend le tout encore plus intense. Leur reprise du « Cortez The Killer » de Neil Young (à voir absolument ici) vient me saisir aux tripes, à tel point que j’en pleure (il fallait bien que ça arrive). Heureusement, le groupe achève son set sur « Coming Home », mettant à contribution toute la tente, et nous laissant avec une réelle sensation de bien-être. Celui d’avoir vécu un pur moment de partage. Je vous le dis, mes amis : cette journée est fantastique !
Bon voilà, je les ai déjà vus deux fois en l’espace d’un an (pour leurs deux premiers concerts depuis plus de dix ans), mais bon sang : LOWRIDER en live, c’est quelque chose qui rend ACCRO. Reste à savoir si c’est dû au taux de fuzz qu’implique leur « forest rock » (l’équivalent suédois du desert rock, selon leur frontman Peder Bergstrand), où au taux de sympathie que nous inspirent ces messieurs. Il y a du monde sous la Valley, beeeaaauuucoup de monde… mais très étrangement, on se sent comme en famille. « Caravan » ouvre les hostilités, et aussitôt, les premiers rangs se mettent à headbanguer comme si leur vie en dépendait. Puis vient « Dust Settlin' », et là c’est l’explosion. De slammeurs. Sur ma tronche de meuf d’1m20. Je résiste dix ou vingt minutes, motivée par l’envie de vibrer à l’unisson des rockeurs suédois, mais l’assaut est plus virulent que prévu et me force à reculer de quelques rangs. En voyant cette Valley chauffée à bloc (et dont l’air est devenu quasi irrespirable), nos Suédois ont le sourire jusqu’aux oreilles, et Peder Bergstrand de nous faire profiter de ses compétences en français entre chaque morceau. Avec une poignée de nouveautés et un « Texas Part I & II » exécuté de main de maître en fin de set, le groupe emplit les fans de bonheur, et conquit les autres avec brio. En ce qui me concerne, je n’arrive plus à marcher droit pendant à peu près une minute après la fin du concert (trop de headbang, m’voyez)… Tchin tchin, Lowrider !
Avec un son heavy punk qui serait carrément plus propice aux ambiances de la Warzone, c’est pourtant bien sur la Valley Stage que les redoutables rednecks de BLACK TUSK vont déchaîner les enfers. Car aucune scène n’est imprenable par le trio de Savannah. Et c’est donc avec la fougue qui les caractérise que les trois lascars envoient cet incomparable et si brutal heavy punk sludge, donnant au passage un énorme coup de pied au cul à quiconque commencer à ressentir le contrecoup physique de cet intense week-end. Le chant à trois voix combiné à cette énergie sans faille saisit la foule, des sourires se dessinent au fur et à mesure du concert (je ne parle pas de ceux provoqués par le torse viril d’Athon, bassiste de son état)… Le groupe prend visiblement un pied monstre, j’ai d’ailleurs du mal à croire que certaines personnes puissent rester impassible face à cette tornade électrique, mais bon, c’est le dernier jour et tout le monde est crevé, bourré, voire les deux. Vivement leur retour en salles !
Après la dérouillée, s’en suit un break vital au cours duquel je rejoins mes comparses de Mars Red Sky pour faire le point et voir comment se passe le week-end de leur côté. Je m’étais promis de voir DOZER à la Valley, car je n’ai jusque là jamais pu les voir dans de bonnes conditions (son dégueulasse au Desertfest 2013, en interview pendant leur set à Londres en février dernier…), mais je faillis une fois de plus pour une raison qui m’échappe. Même chose pour SOUNDGARDEN, à mon grand regret. Après un rapide détour au Food Market, au coeur de la forêt du Muscadet, je tombe nez-à-nez avec les Suédois de LOWRIDER qui ont perdu la trace de leur guitariste Ola. À défaut de retrouver ce dernier, nous décidons d’aller voir SPIRIT CARAVAN sous la Valley. Vus au dernier Desertfest, seule la puissance de frappe de leur grand malade de batteur Henry Vasquez (ci-dessous) m’avait impressionnée, et je dois dire que ce soir encore, je n’arrive pas à totalement rentrer dedans. Peder de Lowrider partage d’ailleurs mon avis, et décide de repartir à la recherche de son gratteux (qui était en fait à quelques mètres de la tente, en train de boire des coups avec une poignée de festivaliers).
La plaine du festival fourmille de peuple pour BLACK SABBATH. Je ne vois que la première moitié du set, car UNIDA enchaîne juste après sous la Valley, et pour être honnête : à part l’émotion qu’engendre le fait d’entendre résonner à plein volume les riffs monstrueux de Tony Iommi, le show des légendes du heavy métal me laisse de marbre. L’impression que le groupe joue au ralenti tout du long, et le chant désastreux d’Ozzy (qui n’est déjà pas ce qu’on peut appeler un bon chanteur) y sont pour beaucoup. Sans me poser de questions, je file donc à la Valley pour ne pas rater une miette d’UNIDA. Un choix qui rattrape grandement les fails de la journée, voire du week-end. Deuxième choix que je ne regrette absolument pas : ne pas aller shooter le concert en fosse photo pour en profiter de A à Z (et au premier rang, s’il vous plaît). Et avec un démarrage sur le très hot « Wet Pussycat », on ne pouvait pas rêver mieux. Le groupe est en très grande forme, même si John Garcia reste toujours aussi peu loquace, et laisse son barbu de gratteux Arthur Seay se charger de nous faire la causette entre les morceaux. La nuit est tombée depuis un moment, la chaleur est retombée, mais il fait 40°C dans nos têtes en ce moment même, grâce au heavy rock über sensuel des Californiens. Se déhancher à un concert de métal ? Je vous assure que c’est possible. Avoir le frisson à un concert d’UNIDA est aussi totalement normal. La « faute » à ce long jam bardé de solos de guitare Santanesque complètement déments, et émouvants. Le set se termine sur un « Black Woman » explosif, et jouissif. I need a beer.
L’ultime concert du week-end se devait d’être spécial, et il n’y avait que ces tarés de TURBONEGRO pour assurer la mission pleinement. Nous sommes à peine rendus à la Warzone que l’énergie délirante du combo britisho-norvégien s’empare aussitôt de moi. Après un week-end passé à bosser, arpenter le site du festival de long en large, manquer de sommeil, se retenir de faire la teuf pour pouvoir assurer, c’est l’heure du putain de lâchage. « All My Friends Are Dead », « Wasted Again », « Fuck The World », « Get It On », tout y passe, et entre tout ça, le charismatique Tony Sylvester balance quelques vannes, jetant même une petite référence à DSK avant d’envoyer « Blow Me (like the wind) ».
Plus le show avance, plus la foule se débride, plus on est proche de la folie généralisée dans la fosse de la Warzone… L’état d’excitation ambiant se prête à mort à l’humour gras des marins rock’n’rollers, qui nous quittent brièvement, puis reviennent de façon fracassante pour un généreux rappel de quatre morceaux, dont une reprise des Dire Straits « Money For Nothing ». Sans mauvais jeu de mot, après plus d’une heure de festivités sans limites ni censure, l’orgasme est définitivement atteint lorsque le groupe entame « I Got Erection »… accompagné d’un matelot fraichement recruté sur les abords de la scène… NICK FUCKING OLIVERI ! Affublé du même chapeau que le reste de la team, on ne pouvait pas rêver mieux que notre sexy desert punk pour hurler le refrain au micro, lequel est repris par TOUTE la plaine. Fou. Les canons à paillettes explosent au dessus de la Warzone, le concert s’achève, et même si on aurait tous continué la teuf aussi longtemps que possible, on repars heureux, un sourire con sur nos visages suants et poussiéreux. Ce putain de show punk’n’rockambolesque était clairement l’apogée de cette journée, ce week-end d’exception. Vous avez fait fort, Hellfest, TRÈS fort. Bon sang, la descente va être rude après ça… Mais heureusement, il y a le Metal Corner et tout le camping pour maintenir la tension pendant encore quelques heures. Certains réveils vont être difficiles !
See you next year Hellfest…
LIRE REPORT DES VENDREDI ET SAMEDI AU HELLFEST 2014
Last modified: 5 septembre 2014