BLOOD INCANTATION + MINAMI DEUTSCH @ Elysée Montmartre (Paris, 07.05.25)

Written by Live

Ce 7 mai 2025 était une date inratable pour les voyageurs de l’espace : la porte des étoiles s’ouvre ce soir sur le Boulevard Rochechouart. Et pas besoin d’être accompagné par ce gros relou de Jeff Bezos ou de Katy Perry. C’est bien dans le vaisseau Blood Incantation qu’on va décoller, direction les confins du cosmos. Attention, ultime épreuve avant de rentrer dans l’Elysée Montmartre : ne pas se tromper de terminal et se laisser embarquer dans la file du public de Finneas (?) escorté par un vigile jusqu’aux portes du Trianon tout proche. Il suffit de suivre les tatouages et les vestes à patchs et le tour est joué.

Incroyable mais vrai, le groupe du Colorado n’avait pas mis les pieds à Paris depuis 2017 lors d’une date au Klub ! Citons AxGxB qui nous en proposait un report complet sur le webzine Thrashocore : “Nous sommes à mi-tournée et Blood Incantation n’a plus grand chose à proposer. Quelques hoodies, un t-shirt long sleeve en S uniquement, pas de CD ni de LP mais une cassette de Starspawn et même pas un petit patch… “

Un beau contraste avec la date de ce soir, avec un merch qui déborde : long sleeves, hoodies, papier à rouler… n’en jetez-plus. Le groupe aurait tort de se priver, tant ça part comme des petites rations de space food. Rien de plus parlant pour mesurer la hausse de popularité des gars de Denver en huit ans, comme celle de leur professionnalisation. Blood Incantation a vraiment percé et bien au-delà des cercles du death metal traditionnel et rien de plus normal vu les incartades prog, psyché ou ambiant qui ont irriguées leur dernières productions.

Dans la salle, même constat : outre le backdrop, le groupe s’est offert une petite déco kitsch du plus bel effet avec la présence de deux obélisques en carton-pâte, rétro-éclairés et ornés de motifs spatio-égyptiens. Un fond de placard issu du film de Roland Emmerich ou même de la série ? Allez savoir… (Mais si, Stargate, ne faites pas semblant de ne pas y avoir pensé.) Le lightshow est lui plutôt sobre et élégant, pas de lasers ou de confettis, c’est pas Hollywood non plus, on est quand même là pour la musique avant tout. Et côté son ? Joker pour le moment, laissons d’abord la place à Minami Deutsch pour sa première partie.

Minami Deutsch pour ouvrir le bal, c’est une autre preuve éclatante de l’ouverture stylistique du groupe vedette et de son public. Le quatuor japonais oeuvre dans des sphères issues d’une longue tradition du rock psyché de l’archipel (Flower Traveling Band, Acid Mother Temple ou Kikagaku Moyo pour en citer un avatar récent), tout en assumant l’influence du krautrock européen des années 70. Pas de quoi crier au scandale au vu des goûts musicaux de leur hôtes américains, mais une partie du public plus portée sur la double pédale pourrait l’avoir mauvaise. Ne boudons pas notre plaisir, c’est une excellente prestation que livre les Tokyoïtes, dopée au motorik beat et lardée de guitares planantes ou tranchantes selon les moments. Petit à petit, le groove emmène la fosse et la laisse atterrire gentiment, convaincue.

Mais attention, l’escale est courte. Au programme du voyage suivant : The Stargate [Tablet I], [Tablet II] puis [Tablet III], vous l’avez compris, c’est bien l’intégralité d’Absolute Elsewhere, et dans l’ordre, que le groupe a décidé de nous envoyer à la figure. Le public massé dans cet Elysée Montmartre complet est clairement là pour ça, tant l’opus a marqué son année, bien au-delà des sphères purement death metal. Bonne nouvelle pour ce premier triptyque : les parties floydiennes se fondent bien mieux dans le maelstrom death et semblent moins “collées” que sur disque. Un bon point. Et ce son alors ? Et bien ça restera le point de frustration pour moi ce soir. Le groupe joue fort, bien et propre. Mais aussi très aigu, ce qui, même avec des bouchons, a tendance à écraser un peu l’ensemble. Surtout, pendant une bonne partie des moments de blast beat, la batterie se retrouve noyée et il s’avère compliqué de distinguer la grosse caisse, ce qui m’empêche un peu d’être emporté pleinement.

Passé ce constat, rien de rédhibitoire pour le public présent qui n’en a cure et se délecte clairement du show. Le groupe déploie les montées et les descentes de la deuxième face The Message d’une main de maître, gérant à merveille la transition jouissive entre les tablettes II et III ainsi que son final harmonisé libérateur. Outre Absolute Elsewhere, c’est sur un titre d’Hidden History of the Human Race et un autre de l’EP Luminescent Bridge, ainsi qu’un solo de clavier rejoint par le batteur qui nous sort son glorieux gong de progeux, que se poursuit le set. Une prestation relativement courte au final, 1h10 mais pas frustrante car plutôt intense.

Je ne sais pas pour vous, mais personnellement, j’aimerais pouvoir juger à nouveau si le groupe mérite sa hype dans un autre cadre, avec un son plus correct (“va te laver les oreilles” serait-on tenté de me répondre). Et si possible avant les huit prochaines années car notre audition ne se sera pas arrangée d’ici là.

Merci à Vedettes pour l’accréditation.




Last modified: 13 mai 2025