Est-qu’avoir sorti le meilleur album post-doom de 2021 suffit à justifier une interview ? Évidemment ! Il y a tellement à décortiquer sur « Seeds », dernier album en date du trio suédois DOMKRAFT, que nous avions besoin de leurs éclaircissements. Voilà ce que le bassiste et vocaliste Martin Wegeland avait à nous dire.
Avant tout, je me dois de vous demander ! Est-ce que l’un d’entre vous est devenu aveugle à force de trop regarder l’artwork de ce nouvel opus ? Blague à part, c’est un concept fou et superbe ! Comment avez-vous eu cette idée et quelle importance revêt l’aspect visuel pour votre groupe ?
De ce que l’on sait, aucun dégât oculaire à signaler pour l’instant ! Mais oui, il y a beaucoup d’éléments à digérer ici. Le concept tout entier vient de notre artiste attitré Björn Atldax qui souhaitait produire quelque chose de vibrant et perturbant tout en 3D. Nous lui laissons toujours carte blanche pour faire ce qu’il veut. Il nous connaît et comprend particulièrement bien et ce même s’il n’est pas branché musiques extrêmes. Et je pense que l’aspect visuel est important. Il ajoute une dimension supplémentaire à la musique.
J’ai eu la chance de pouvoir écouter très tôt votre nouvel album. Je l’ai fait tourner encore et encore et encore et ce qui m’a frappé au fil des écoutes c’est clairement le rendu incroyablement massif du son ! Comment avez-vous obtenu ce résultat ? Diriez-vous que c’est l’écriture qui joue ici un rôle clé pour ajouter de la lourdeur ou bien la méthode d’enregistrement est toute aussi importante ?
Sympa, merci ! C’est plutôt une combinaison des deux. Nous avons beaucoup travaillé pour avoir le bon groove sur chaque titre, celui permettant à chaque instrument de faire son truc au lieu d’avoir simplement un martèlement continu tout du long. Et pour que cela marche nous avons opté pour un son plus gros et plus riche lors de l’enregistrement. Beaucoup plus de marge de manoeuvre, d’espace et juste ce son lourd et large avant tout.
En parlant d’écriture, c’est toujours rafraîchissant de voir des groupes se réapproprier des genres aussi codifiés que le Doom ou le Sludge. Avez-vous l’impression d’appartenir à ces scènes ? Comment décrivez-vous habituellement le son Domkraft ?
En général, on dit qu’on joue du heavy rock un peu psychédélique. Ce n’est peut-être pas la description la plus exacte mais elle a du sens car elle inclut des éléments des genres auxquels les gens nous rattachent comme le Doom, le stoner, le Sludge ou le space rock sans pour autant se limiter à un ou deux de ces genres. C’est juste un gros mélange de tout ça et plus encore.
Pour rebondir, nombre de groupes affirment se moquer des étiquettes pourtant, dans l’industrie rock et métal, il est impossible d’éviter d’être catégorisé. Quel est votre sentiment général concernant les différentes scènes auxquelles un groupe appartient ? La musique prime-t-elle vraiment sur tout le reste ?
Je comprends parfaitement l’utilité de ces catégorisations de genres dans certains cas. On a tous besoin d’éléments pour nous aider à naviguer dans le flot constant de nouveaux titres et nouveaux groupes. Et j’ai un grand respect pour les groupes qui se dédient entièrement à un seul style mais je ne crois pas que l’on pourrait faire cela un jour. Nos influences sont bien trop diverses et elles colorent nécessairement le résultat.
Vous avez enregistré « Seeds » en seulement trois ou quatre jours. Était-ce un choix délibéré afin de capturer l’essence brute du moment ou bien est-ce que c’est arrivé ainsi, sans préméditation ?
On enregistre toujours ainsi. Nous trois dans une pièce, sans métronome, en mode « lance l’enregistrement sur le magnéto » en gros. C’est la seule façon de faire qui fonctionne pour nous. Il y a toujours une place laissée pour l’improvisation quand on rentre en studio et pour s’assurer de repartir avec la meilleure prise, il faut qu’on soit dans le bon état d’esprit en faisant cela tous ensembles. Cette vibe, c’est toujours beaucoup plus important qu’une quelconque perfection. Et puis ça nous fait économiser du temps et de l’argent…
“Audiodome” est une conclusion parfaite pour l’album et le titre le plus long de celui-ci, pourtant, cette piste commence par un Riff rapide avec un rien de punk hardcore mid tempo. C’est une démarche assez inhabituelle que de faire d’un titre rapide le plus long et le point culminant d’un album. Comment est né ce titre ? Était-ce votre volonté dès la phase d’écriture d’en faire la pièce maîtresse et finale de « Seeds » ?
Je crois que ce morceau est arrivé de manière habituelle. Martin et moi on avait chacun un riff que l’on a combiné et Anders avait un pattern de batterie bien costaud. Ensuite, on a juste bossé l’arrangement de façon un peu différente car il y avait un fort sentiment d’urgence dans les deux riffs. Dès que les fondations du morceau ont été posées, on savait que ce titre devait ouvrir ou conclure l’album. Et lorsque l’on a ajouté le motif mélodique qui suit la partie rapide et la partie plus lourde, il est devenu clair que ce serait le titre final. L’idée c’était que les gens gardent en tête une mélodie qu’ils puissent vaguement chantonner… haha
Depuis ses débuts, Domkraft à été particulièrement prolifique. Avez-vous une formule magique que vous appliquez ou est-ce que chaque chanson nait d’une manière un peu différente avec un processus de création propre ?
Je crois en effet qu’on a une certaine forme de méthode mais je ne suis pas sûr de la connaître moi même ! Je pense que le facteur déterminant est que Martin et moi jouons ensemble depuis très longtemps dans différents groupes donc on sait ce que l’on aime et comment travailler nos idées ensemble. Cela commence quasiment toujours par un riff minimaliste ou un beat sur lequel on jam et qui progressivement devient quelque chose de concret. Cela dit parfois, les idées arrivent de manière très inattendue et l’on ne sait même plus d’où elles viennent. Je pense qu’il faut garder l’esprit ouvert et être concentré lors des répétitions tous ensembles. C’est la réponse la plus honnête.
Dans cette scène, le chant est souvent perçu comme un instrument supplémentaire, un élément de plus avec lequel créer. Pourtant, parce qu’il y a des paroles, le chant occupe toujours une place spéciale pour l’auditeur. Comment travaillez-vous le chant en général ? Arrive-t-il en dernier, et a-t-il un poids plus important que les autres instruments ?
Pour nous aussi, il s’agit simplement d’un instrument supplémentaire. Habituellement, les lignes de chant prennent forme lors de l’arrangement ou lors de nos jams sur les différents morceaux. Les paroles quant à elles arrivent bien plus tard et dépendent seulement de la vibe que l’on ressent sur chaque titre. Il faut que tous les éléments fonctionnent parfaitement ensemble.
Puisqu’en fin nous allons pouvoir retourner voir des concerts bientôt et que les groupes de Doom / Sludge sont connus pour utiliser des rigs de matériel rare, peu conventionnels et qui sonnent forts, existe-t-il une pièce d’équipement sans laquelle Domkraft ne serait pas Domkraft ? Un élément que vous aimez vous vanter de posséder ou ne pourriez pas envisager de ne pas emmener en tournée ?
Ha! C’est plutôt une question pour l’autre Martin du groupe, c’est lui le nerd matos de Domkraft. Il a besoin d’un certain matériel pour rendre correctement justice à son son. De mon côté si je devais mentionner un élément ce serait nos pédales wah wah. On a besoin de modèles spécifiques de Cry Baby pour guitare et basse avec une grande amplitude de fréquence et un départ auto. La majorité de nos autres pédales peuvent être remplacées, mais elles nous assurent une zone de confort. Et, bien sûr, Martin mentionnerait sa Fender Jaguar vintage qu’il a dénichée l’an dernier. Cette guitare a vécu bien des vies!
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Last modified: 28 décembre 2021