J’en avais bien besoin de cette grosse claque de lourdeur dans la gueule ! Ma journée n’avait pas été des plus agréables, rien qui va au boulot, ma femme qui tombe malade, ma voiture qui a un pneu dégonflé et me voilà à devoir faire quatre stations pour pouvoir enfin le regonfler … autant vous dire qu’en arrivant devant le Rex, alors que les premiers accords de Witchthroat Serpent se faisait déjà entendre, c’était quitte ou double. Soit ce concert me remet d’aplomb, soit ce sera une belle semaine de merde. Spoiler: ce matin, j’ai le sourire aux lèvres.
Ce sont quelques 250 furieux, fuzzers et doomers de tous chemins, passionnés et prêts à en découdre qui s’étaient réunis au Rex pour ce plateau particulièrement qualitatif. Le grand cru local et la légende italienne, un programme forcément alléchant.
Arrivant donc légèrement en retard, je profite quand même de 45 minutes du set de Witchthroat Serpent et il faut l’avouer, c’est toujours un plaisir. Ça joue juste, ça sonne, ça se donne sur scène et pour cette fois, pas que du côté du bassiste même si l’ami Ügo reste une sacrée bête de scène, bref, c’est du kiff pur. Musicalement, on connaît la recette, des riffs lourds mais plus complexes qu’ils n’y paraissent, des mélodies occultes envoûtantes, quelques chants très 70’s et cette impression qu’à tout moment le démon va débouler dans la salle. Alternant les époques mais mettant surtout en avant le dernier album « Trove Of Oddities At The Devil’s Driveway”, le set est un régal de bout en bout. Pompom sur la Garonne, cette performance de haute volée se fait avec un batteur remplaçant ! Certes, on sentait que certains automatismes manquaient un peu, mais cela reste une belle prouesse à mentionner.
Le temps d’un petit verre avec les copains et déjà Ufomammut s’apprête à nous écraser la tronche. Pour ceux qui ne seraient pas vraiment familiers avec les italiens, malgré leurs 25 ans de carrière que nous célébrons ce soir, plantons le décor. Ufo parce que, quand même, les mecs aiment foutre des nappes de synthés et effets chelous façon film de SF à petit budget un peu partout. Mammut parce que tu vas prendre deux tonnes dans la face et que te relever sera bien difficile.
Mes souvenirs du set sont déjà confus. Parce que Ufomammut en live, c’est un peu une vague qui s’abat sur toi et t’entraines dans le fond. Parfois, tu sembles voir la lumière, entre deux morceaux ou parce que sur une certaine partie les larsens s’atténuent ou que la batterie repart seule mais inexorablement, un mur de violence s’abat à nouveau sur toi. Chez Ufomammut, la mélodie, c’est anecdotique : ce qui compte c’est la lourdeur, la puissance, une certaine noirceur dans les riffs. Un peu de chant et ces quelques effets de synthé suffisent à ne pas tomber dans la salade de riff pour autant.
Et du coup sur scène, en tête d’affiche avec plus d’une heure devant eux, ça donne quoi ? Et bien cela permet d’abord d’apprécier les qualités d’écriture de Ufomammut. Parce qu’avoir les riffs c’est une chose, mais savoir avec une telle maestria combien de fois les jouer pour imposer leur transe magnifique sans jamais ennuyer, ça c’est autre chose. Chaque partie dure précisément ce qu’il faut, la puissance évocatrice de la répétition sans jamais sombrer dans la caricature. Il faut aussi souligner le son car forcément ici, on s’accorde bas, on joue sur des amplis que même les rock stars des 70’s n’oseraient pas pousser à block et c’est d’une implacable efficacité.
En live, Ufomammut se déleste des ambiances beaucoup plus planantes qui peuplent une partie de leur discographie pour se concentrer sur le gros oeuvre : les parpaings, c’est dans les dents direct. Pour ça, leur dernier opus “Hidden” est un véritable retour aux sources et les morceaux qui en sont tirés ce soir sont ceux qui m’ont le plus convaincu et ça tombe bien. Même s’il s’agit de la tournée des 25 ans, cet album reste de loin le plus mis en avant.
Alors après tout ça, même si j’ai encore du cambouis sur les mains, même si j’ai pas mangé et que j’ai une dalle insoutenable, je suis heureux de cette soirée particulièrement salvatrice. Je vois cette mini foule sortir de la salle, secouée mais ravie et je me dis que quand même : le doom c’est la vie.
Last modified: 28 novembre 2024