Hébergé chez Sub Pop depuis 2007, Pissed Jeans, sorte de vilain petit canard d’un catalogue soigné et propre sur lui, a sorti cette fin d’hiver son sixième album.
Pissed Jeans a beau ne pas être le groupe le plus productif qui soit (les gars ayant tous des jobs à plein temps, d’où la rareté de leurs concerts), mais c’est aussi ce qui leur permet de composer ce qu’ils veulent et quand ils veulent, sans avoir la pression de qui ou quoi que ce soit. Des artistes, quoi. Pour des mecs rangés des bagnoles socialement, on a du mal à croire que ce sont les mêmes qui jouent dans ce groupe barré, anachronique et voué à l’échec commercial.
Parce que depuis 2005 et leur premier album « Shallow », rien n’a changé ou presque dans la musique de Pissed Jeans — contraste à peine concevable avec les personnes qu’ils sont en dehors de la scène. Du punk arraché qui vocifère sur la condition humaine, ok, on en a (ou on en a eu). Il change quoi ce « Half Divorced » ? Lancez-le.
Alors ? Depuis quand n’avait-on eu un tel album capable de se foutre de tout, de tout le monde, alors qu’on a l’impression d’être au cœur d’une fiesta aux dimensions surréalistes dignes de scènes de Las Vegas Parano ? Seuls ces punks invétérés de Pissed Jeans étaient capables d’autant de dérision (et d’auto-dérision) bordélique, sur un ton bien plus humoristique que les meilleurs comiques (qui sont tous morts de toute façon).
Le chant de Matt Korvette, scandé tel un punk sorti d’un caniveau londonien circa 77 et ses paroles à la fois acerbes et à mourir de rire, forment le plus gros foutage de gueule de ce qu’est le quotidien de la vie d’adultes raisonnables, aliénés et chiants au plus haut point. Et musicalement, ses acolytes ne sont pas en reste : Bradley Fry et Randy Huth martyrisent leurs grattes et font saigner vos oreilles, Sean McGuiness déglingue ses fûts à tout va, pour un résultat tout en folie qui vous fait passer du pogo sauvage à des airs dansants et sautillants pour lancer une chenille déglingo à faire honte à n’importe quelle assistance de mariage à la con.
Le quatuor de Pennsylvannie est la bande son post-pandémie qui vient, avec son énergie et sa verve, réveiller le mou qui a pris le dessus dans ce pseudo monde d’après. Si vous n’avez pas peur de vous regarder dans le miroir ou si vous avez envie de péter les chicots à ce que vous y voyez, « Half Divorced » est fait pour vous. Sinon ? Restez dans votre routine chiante, moi je me tire, même si c’est pourri partout.
Last modified: 25 avril 2024