Un trio, trois sommets pour un groupe nommé Pyramid. Les bases de ce triangle musical sont jetées en 2019 avec la sortie d’un premier album « Mind Maze ». Ont suivis deux tournées européennes, notamment en première partie d’éminences psychédéliques tels que Color Haze et Elder, permettant à Pyramid de se forger une solide réputation outre-Rhin auprès de tout aficionados de voyage en tapis volant. Les fondations de la pyramide étant désormais en place, il est l’heure pour Michael Kümpflein (basse/ clavier), Lukas Schomann (batterie) et Shane Saban (guitare) de bâtir, pierre par pierre, l’édifice qui les fera côtoyer les sommets.
Il faut aujourd’hui reconnaître que la galaxie Stoner/Psyché a le vent en poupe, porté par le récent succès de King Buffalo, Kanaan et surtout Slift, faisant rejaillir une appétence pour tout ceux qui arrivent à placer Kraut, Space Rock et jams psychédéliques dans le pedigree du groupe. Nombre de projets sortent dans les bacs. Avec plus ou moins de succès. Difficile de sortir du lot… sauf pour ceux qui ont compris que le bon dieu se niche dans les détails. C’est donc les subtilités des arrangements, les effets apportés et la syntaxe sonore parsemant ce labyrinthe de riffs stoner, qui font de ce « Beyond Borders of Time » une belle surprise instrumentale totalement immersive.
Ici, point de rallonge tortueuse ou ennuyeuse. Chaque oeuvre composant l’architecture de cet album dépasse rarement les 7 minutes. Le trio sait se faire concis dans la construction de ses titres, porté par une dynamique rythmique intéressante. Oui, « The Medicine Man » et son riff si distinct qui s’accélère, ou « Sunbeam » et son groove entêtant et joyeux, presque funk ont de quoi surprendre. Il est agréable de se laisser porter par un groupe dont l’ambition, la construction, strate par strate, est claire, sans circonvolutions alambiquées.
Mais ce bien nommé « Beyond Borders of Time » ne nous offre pas que la possibilité de nous transporter vers un ailleurs et un autre temps, c’est également un prodigieux vecteur de sensations. Le trio compose une musique qui se ressent, qui se voit, qui se hume. « Sunbeam » est ce rayon de soleil fendant la pénombre qui vous réchauffe le visage au matin; « Petrichor » c’est ce moment lorsque la pluie tombe et que son odeur jaillit, et avec elle cette impression de bien être; « Solar Flare » c’est une explosion de couleurs, panaches rougeoyants et filaments éclatants dont le cosmos serait la toile de fond.
Il y a en effet une volonté de lier l’insignifiant de notre perception et de nos sentiments, à l’immensité du monde qui nous entoure. Quelque part entre la fluidité de My Sleeping Karma et la répétition des motifs de Yawning Man, Pyramid offre une musique lumineuse qui évade l’esprit et élève la conscience. « Prototype » (qui n’en n’est pas un), épilogue en compendium de tout ce que nous avons ressenti jusqu’ici, serait alors un voyage démarrant du profond de notre âme vers l’infinité de l’Univers.
Il est intéressant d’entrevoir comment le blaze du combo fait sens dans sa symbolique et le style de sa musique. La forme équilibrée de la pyramide apparaît comme une synthèse de forces verticales et horizontales et sa construction incomparablement massive semble la concrétisation d’un ordre stable et éternel. Comment ne pas y voir ce que le groupe à de mieux à donner ? Un savoir faire et une maturité créative nous permettant de nous élever vers des sommets de sensations. Imhotep.
Last modified: 28 mars 2024