Acid Mammoth est le premier groupe dont j’ai pu voir le set en ce dimanche ensoleillé et dernier jour du Desertfest London 2023. Peu après le show, j’ai eu la chance d’échanger avec Chris Babalis Jr, frontman de ce quatuor phénomène du doom grec. On a parlé filiation, Gibson SG et expérience acquise en tournée et avons passé un super moment avec la crème de la crème !
Pour lancer cette discussion, j’ai une question fondamentale concernant votre nom de groupe. Acid Mammoth. Quand vous avez choisi ce nom, vous pensiez plutôt à un Mammouth sous acide ou à un acide tellement gros qu’on ne peut que le qualifier de pachydermique ?
Chris (voix, guitare rythmique) : Tout est une histoire de mammouth, tu sais. Quand nous avons créé le groupe, on voulait un nom qui reflétait notre son sous toutes ses formes. J’aime l’idée que chaque riff de guitare, chaque pattern de batterie est comme l’empreinte d’un mammouth ou d’une horde de mammouths qui marchent dans ta direction. C’est ainsi qu’on a trouvé ce nom. Quant à la partie acide, elle vient de l’acide d’un point de vue biologique, imagine un monde primitif avec des lacs d’acide, des hommes singes zombies et des mammouths. Plus ou moins comme dans le show Primal.
Comment s’est passé votre récente tournée de plus de vingt dates en Europe ?
Chris : Ça nous paraît toujours irréel. Depuis qu’on a 12 ans et qu’on a commencé à écouter Black Sabbath et ce genre de groupes, notre plus grand rêve c’était de monter un groupe, jouer des morceaux ensemble et faire des concerts. C’est un rêve devenu réalité. Quant au fait de faire des concerts partout en Europe, je n’y crois toujours pas, c’est fou. On s’est retrouvé à jouer tellement de fois en France, en Italie, en Allemagne ou même en Croatie, ça n’a aucun sens. Cette expérience est juste incroyable.
« Depuis qu’on a 12 ans et qu’on a commencé à écouter Black Sabbath et ce genre de groupes, notre plus grand rêve c’était de monter un groupe, jouer des morceaux ensemble et faire des concerts. C’est un rêve devenu réalité. » – Chris Babalis Jr
La notoriété de votre groupe a complètement explosé pendant la pandémie. Alors que tout le monde commençait à parler de vous, la pandémie a débarqué, alors quand tout ça a été derrière nous, tout le monde voulait vous voir. Et on en a eu la preuve aujourd’hui : personne ne s’attendait à voir l’Underworld plein à craquer si tôt dans la journée.
Chris : La pandémie c’était complètement dingue parce qu’on a signé avec Heavy Psych Sounds pour sortir notre deuxième album et il est sorti en janvier 2020, juste avant… Je peux être malpoli ?
C’est un webzine français, tu peux jurer autant que tu veux.
Chris : Juste avant que le monde s’enlise dans cette merde. Juste au moment où on commençait à prévoir de jouer à tel ou tel endroit, le monde entier se retrouvait coincé entre quatre murs pour une durée indéfinie. Au moment où l’on était morts de faim à l’idée de jouer : rideau. C’était une vrai déception, mais peut être que c’était pour le mieux car on a gardé cette flamme en nous et dès que le monde s’est ouvert, on a fait notre premier concert en dehors de la Grèce. C’était au Desertfest Anvers et c’était le plus beau jour de ma vie !
J’y étais ! Quel show !
Chris : Toute cette situation, ça nous a juste motivé encore plus à jouer. De nos deux tournées, je ne garde que des souvenirs positifs. Bien sûr, toute personne ayant déjà tourné sait que les heures de sommeil se font rares etc. Mais ça ne compte pas au final.
Penses-tu que cette expérience en tournée a changé le groupe ? Est-ce que ça impacte votre dynamique ou l’écriture ?
Chris : Bien sûr, même dans l’écriture, il y a une grosse différence quand on jamme tous les quatre dans le studio et qu’on enregistre, comparé au fait de jouer devant des gens, de voir ce qu’ils aiment, à quoi ils réagissent. C’est pour ça qu’on a joué un nouveau morceau tous les soirs sur cette tournée pour voir les réactions. Heureusement elles ont été positives. En jouant tous les jours, on devient meilleurs. Notre alchimie est renforcée si je puis dire.
Peux-tu me parler du songwriting ? Est-ce que vous fonctionnez en jammant ou est-ce que vous partez d’une base que l’un de vous apporte ?
Chris : Plutôt la seconde option. La majorité des morceaux viennent de cette manière. Mais parfois on est juste en train de chiller, de jammer et quelque chose ressort, mais il y a généralement un plan qu’on ramène de la maison. Ce qui marche pour nous, c’est de profiter des moments qu’on passe ensemble. Comme on travaille six jours sur sept, les moments où on peut juste se retrouver pour regarder un film ou quoi sont super importants. Et si on est dans une bonne vibe, on prend nos instruments et on commence de là. C’est un tout. Quand une idée vient, on fait attention à ce que chaque riff ait du sens pour nous. On ne sortira jamais un riff filler juste parce qu’il nous manque deux minutes de musique par exemple.
J’avais dit que je ne m’aventurerais pas sur cette voie mais il le faut ! D’où vient la passion du groupe pour les Gibson SG ?
Chris : Mon père a grandi au Canada en écoutant du Sabbath dans les années 70’s et Iommi était son dieu. Du coup c’est lui qui m’a initié aux musiques heavy et il avait cette SG Bordeaux classique. Depuis mon adolescence, cette guitare était là et on jouait dessus tous les deux. Quand j’ai commencé à jouer de la guitare, je ne me sentais à l’aise sur rien d’autre. J’ai essayé des Flying V et des tas de guitares mais ça ne marchait pas. Dès que je touche un SG, je me sens à la maison. Je ne sais pas si c’est parce que j’ai été exposé très tôt à une SG ou si elles fonctionnent juste mieux pour moi. Aujourd’hui j’ai une SG gothic, c’est ma guitare préférée et je n’en changerai pour rien au monde.
« Il n’y avait personne de plus adapté pour la guitare lead que mon père. On n’en a même pas discuté. J’ai dit : « hey Papa, tu joues dans un groupe », « quel groupe? », « du doom metal comme Sabbath », « ok ça me va ». » – Chris Babalis Jr
J’allais justement aborder le sujet de ta relation avec ton père. C’est tellement un moment feel-good quand on vous voit sur scène. C’est genre, tu as ton père et tes amis d’enfance, c’est tout ce dont tu as besoin.
Chris : Exactement. On a grandi ensemble avec les autres gars. On se connait depuis l’école et mon père… Eh bien, c’est mon père. C’est le plus grand fan de Black Sabbath depuis les 70’s et il m’y a initié avec « Sabotage ». Lorsqu’on a commencé à jouer avec Dimos (le bassiste) et que je montrais des riffs à mon père c’était du style « on a ce riff, tu aimes ? Tu crois qu’on devrait en faire quelque chose ? ». Il n’y avait personne de plus adapté pour le poste de guitare lead. On n’en a même pas discuté. J’ai dit : « hey Papa, tu joues dans un groupe », « quel groupe ? », « du doom metal comme Sabbath », « ok ça me va. » Et voilà. On a toujours été très proches. On vit quasiment à côté l’un de l’autre et on est tout le temps en train de jammer ensemble. Il y a une forme de simplicité entre nous. Bien sûr parfois il ne me voit pas comme un autre membre du groupe mais comme son fils. Ça amène des situations cocasses. Du genre il va me dire « Non, tu ne vas pas mettre 5€ dans du café » en tournée. Il est à la fois mon père et mon collègue. C’est une dynamique assez drôle. De la même manière, je suis trop protecteur à son égard. Si quelque chose lui arrive, je suis toujours là pour l’aider, et puis je ne laisse rien porter de lourd etc.
À chaque fois que je vous vois jouer, vous donnez l’impression de vous éclater comme jamais.
Chris : C’est l’objectif. On s’est fait la promesse à nous même de ne jamais perdre notre enthousiasme. C’est ce qui nous fait avancer. Peu importe s’il y a 50, 100 personnes ou plus. Qu’on joue à Toulouse ou ailleurs alors qu’on vient d’Athènes, c’est impossible que ça ne nous motive pas.
Y’a-t-il un groupe que tu comptes voir aujourd’hui ?
Chris : Uncle Acid est probablement mon groupe préféré actuellement. J’aimerais aussi voir Nebula et Boris. Je vais rater Weedpecker et ça me chagrine. J’irai voir Mars Red Sky aussi. Si je pouvais, j’irai voir tout le monde. Mais Uncle Acid ça reste la priorité, je suis tellement fan. A tous les coups je vais pleurer quand ils monteront sur scène.
Tu as eu ton moment « célébrité » toi aussi, juste après votre concert aujourd’hui. Tout le monde voulait se prendre en photo avec vous, c’est quelque chose qu’on voit de moins en moins.
Chris : C’est incroyable. Je suis toujours heureux de rencontrer tout le monde, demander leurs prénoms et c’est pareil pour les autres dans le groupe. On se sent vraiment chanceux. C’est uniquement grâce à notre label qu’on est là aujourd’hui (big love à eux au passage). On est content de parler avec les gens. Quelqu’un qui vient d’ailleurs, a fait le déplacement pour te voir, te connait et veut te rencontrer, bien sûr que tu vas vouloir échanger, savoir d’où ils viennent etc.
Dernière question, c’est quoi la suite pour Acid Mammoth ?
Chris : D’abord un nouvel album pour lequel on vient de finir d’enregistrer les guitares. Et, petit scoop, on est en train de ré-enregistrer notre premier album pour le ressortir. Vous pouvez vous attendre à une flopée de riffs massifs. Et bien sûr des tonnes de concerts. Chaque fois qu’on aura l’occasion de sortir de Grèce pour jouer, on le fera. Le COVID a beaucoup joué à ce niveau car après « Under Acid Hoof » et notre split avec 1782, on avait prévu de tourner, mais le COVID est arrivé alors on a décidé d’enregistrer un autre album. L’enregistrement de « Caravan » fut très différent. Pour « Under Acid Hoof », on avait tout le temps qu’on voulait. Pour « Caravan », on a commencé l’enregistrement alors que les premiers confinements se terminaient et juste lorsqu’on allait attaquer le mixage, le deuxième confinement a débuté. C’était un vrai cauchemar mais le résultat nous a plu. On adore comment sonne l’album.
On l’adore aussi ! Encore merci d’avoir pris le temps d’échanger ces quelques mots !
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Last modified: 13 juillet 2023