Évacuons ça directement : OUI, je suis un fanboy de Nick Oliveri et il est rare que je n’apprécie pas ses productions. Ça, c’est dit. Pourtant, je n’ai pas aimé “Stoners Rule”, le premier album de STÖNER. Sur le papier, les retrouvailles de Nick et Brant Bjork me faisaient saliver et même si les lignes et le son de basse étaient franchement intéressants, le reste m’avait laissé de marbre. Ces jams beaucoup trop bluesy et policés, tout en finesse et retenue, la quasi absence de Nick au chant : j’étais face à un album solo de Brant Bjork, mais pas l’un des plus inspirés. L’album avait cependant pour lui une spontanéité non feinte et déjà quelques touches d’un humour inattendu.
Et voilà qu’ils remettent le couvert. Ça commence par un artwork, comment dire… à mi chemin entre le génie et l’immonde blague. Imaginez un Léo De Vinci Code qui dessinerait la Joconde dans son vomi. Et après un premier single un poil oubliable, je m’attendais à une nouvelle déception.
Pourtant, après les premières écoutes, force est de constater que le groupe a remonté le niveau. La production est toujours très basique mais les guitares ont un son plus personnel, moins bluesy et plus instable. Les chants sont beaucoup plus partagés, les riffs plus inspirés et empruntant à des registres plus larges et que dire des innombrables solos de guitares, nettement plus créatifs. La recette n’est pourtant pas si différente, tous les riffs jouant beaucoup sur cet aspect jam à l’arrache. Mais il suffit de comparer “Strawberry Creek” avec “Own Your Blues” et vous verrez tout de suite ce qui fonctionne mieux sur “totally…”. Cette guitare renouant avec un son tout en medium à la Kyuss ou débuts de Qotsa, ces chœurs improvisés, ce solo tout à l’Octavia sentant bon les seventies, c’est plus frais et tellement plus généreux.
Le groupe se permet même le luxe d’un passage de doom sur le morceau à tiroir “Space Dude and The Burn”. Je répète : Nick Oliveri et Brant Bjork s’essayent au doom (pour une minute d’anthologie). Rien que pour ça, ça vaut le détour. Un vieux sage m’a dit un jour qu’une minute ne peut sauver un album ! Mais bon, j’écoute pas les vieux sages, moi. Je me dois aussi de mentionner les riffs de gratte plus dissonants et incisifs sur « Turn It Around Now » et « Stöner Theme » et, bien sûr, cette basse ronde et particulièrement chargée qui accompagne tout l’album. La production est un gros point fort de l’album : elle a du caractère sans être dérangeante, la gratte sonne terriblement bien dans ce registre acid rock stoner et la basse et la batterie trouvent parfaitement leur place et leurs fréquences dans le mix.
Pas de brûlot punk ou de piste de hippy psyché cette fois-ci, juste un équilibre enfin trouvé entre les univers de Brant et Nick, comme à la vieille époque finalement. Même le batteur Ryan Güt semble bien plus s’amuser, sans jamais occuper les premiers rôles cela dit. Et si finalement, c’était ce lâcher prise et ce fun qui suffisait à rendre ce côté jam beaucoup plus réussi et appréciable ? Trois amis qui ne se posent pas de questions, ne cherchent pas à recréer une masterpiece de leur passé ni à révolutionner quoique ce soit, mais font ce qui les branche, sans calcul et sans contrainte.
Avec « totally… », Stöner nous démontre une grande force d’autodérision et surtout apparaît enfin comme un groupe à part entière, développant un son et univers bien à eux. Comme un Mondo Generator qui aurait décidé de jammer sur chaque titre, ou un Low Desert Punk sous stéroïde. Tout le monde ne trouvera pas cela intéressant, et ce n’est ni un indispensable de ces deux parrains de la scène, ni un grand album de genre. Mais c’est un album qui donnera le sourire aux die hard fans des deux bros et aux aficionados d’un desert punk authentique et fun. Que demander de plus ?
Last modified: 5 mai 2022